Les acclamations : le « Saint, le Seigneur »

5 Mai 2014: Veillée de prière pour la Vie présidée par le Card. André VINGT-TROIS, archev. de Paris, avec les év. d'Ile-de-France. Cath. Notre-Dame. Paris (75) France. May 5th, 2014: Prayer vigil for Life presided by Cardinal André VINGT-TROIS with the bishops of Ile-de-France. Notre-Dame Cath. Paris (75) France.

Le Sanctus est une suite d’acclamations tirées de l’Écriture – Isaïe, Matthieu – dont l’enchaînement doit respecter la portée propre de chacune.

La Présentation Générale du Missel Romain (PGMR) écrit : « Toute l’assemblée, s’unissant aux puissances d’en haut, chante le Sanctus. Cette acclamation, qui fait partie de la prière eucharistique, est prononcée par tout le peuple avec le prêtre (PGMR 79 a et b). Ces indications sont déterminantes pour la compréhension et la juste interprétation du « Saint, le Seigneur », présent dans la liturgie depuis le IVe siècle.

 

L’origine et la structure

Le texte de l’acclamation renvoie d’abord à Isaïe 6, 2 – 3 : « Des séraphins se tenaient au dessus du Seigneur. Ils avaient chacun six ailes : deux pour se couvrir le visage, deux pour voler. Ils se criaient l’un à l’autre : « Saint ! Saint ! Saint, le Seigneur de l’univers ! Toute la terre est remplie de sa gloire. »

La seconde partie du texte « Beni soit celui qui vient au nom du Seigneur » et « Hosanna ! » renvoie au récit de l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem : « Les foules qui marchaient devant Jésus et celles qui suivaient criaient : « Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Hosanna au plus haut des cieux ! » (Mt 21, 9).

Le Sanctus est en réalité une suite d’acclamations dont l’enchaînement doit respecter la portée propre à chacune :

a) « Saint ! Saint ! Saint ! » : adoration grave et solennelle, à l’image de celle que chantent les séraphins, le visage couvert de deux ailes pour manifester l’adoration et la distance respectueuse qui existe entre Dieu et ses créatures. Même si Dieu est un père plein d’amour et de tendresse, cela n’élimine en rien le respect qu’un enfant doit à son père.

b) « Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire ! » : cri d’admiration et d’émerveillement devant l’œuvre de Dieu.

c) « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » : acclamation adressée au Christ, Lui qui est venu et qui viendra à la fin des temps.

d) « Hosanna ! » peut se traduire par « De grâce, sauve-nous » ; c’est un cri d’appel vers Dieu.

La mise en œuvre

Une première conséquence tient au respect du texte de l’Écriture. On chante encore ici ou là des versions tout à fait fantaisistes du « Saint le Seigneur ». De quel droit modifie-t-on ainsi, selon ses propres sentiments ou par facilité musicale, le texte de l’Écriture, parole de Dieu, parole que Dieu nous donne pour l’acclamer ? D’autant que l’acclamation fait partie intégrante de la prière eucharistique. Nous ne sommes pas les maitres de la liturgie ; nous en sommes les dépositaires qui la servons humblement. D’autant que c’est l’Église de la terre et l’Église du ciel qui acclament Dieu avec les mêmes mots. Il convient donc d’éliminer définitivement de nos répertoires ces « Saint le Seigneur » qui ne respectent ni le texte de l’Écriture, ni la structure de l’acclamation, ajoutent des éléments qui n’ont rien à y faire ou en retranchent une partie. Souvent aussi certaines compositions font reprendre « Saint le Seigneur », à la manière d’un refrain. Ces reprises présentent deux graves inconvénients : elles transforment l’acclamation en un cantique à refrain et la déstructurent totalement en brisant sa dynamique (acclamation adorante, admiration pour la création, cri vers Dieu, bénédiction pour le salut donné en Jésus). Il faut aussi noter que le dernier « Hosanna » introduit directement à la suite de la Prière eucharistique, grande louange adressée à Dieu dont on ne doit pas le dissocier.

La seconde conséquence tient à la réalisation musicale. Généralement, la préface se termine par une invitation à chanter tous ensemble : « En chantant d’une seule voix » ; « Laisse nous joindre nos voix » ; « Pleins de joie, nous chantons » ; « Tous ensemble nous chantons », etc. C’est l’assemblée tout entière qui chante l’acclamation. Elle ne saurait donc être réduite au silence et, si une polyphonie existe, elle vient enrichir le chant de l’assemblée.

Par ailleurs, peu de musiques tiennent compte du caractère à la fois adorant et acclamatoire de la première phase. L’interprétation peut ici jouer un rôle important si on aide le groupe de chant et l’assemblée à faire la distinction entre l’adoration du début et l’acclamation du « Hosanna »

Enfin, pour plus de justesse, on pourra réserver les mélodies plus éclatantes aux jours et temps de fête (Noël, Pâques, Pentecôte…), des mélodies plus retenues pendant le carême, le même « Saint le Seigneur » pouvant accompagner tout un temps liturgique et ainsi donner à la liturgie sa couleur particulière.

L’enjeu est bien la capacité ou non de l’acclamation choisie à mettre en œuvre la juste attitude spirituelle que requiert la liturgie.