La liturgie des Heures, « un trésor de vie spirituelle »

23 mars 2012: Mains de femme en prière avec un chapelet sur un livre de psaumes.Egl. Saint Pierre de Montmartre, Paris (75), France. March 23rd, 2012: Woman's hands praying with a rosary on an open book of psalms. Saint Pierre de Montmartre Church, Paris (75), France.

23 mars 2012: Mains de femme en prière avec un chapelet sur un livre de psaumes. Egl. Saint Pierre de Montmartre, Paris (75).

Pour comprendre le chemin spirituel que trace la liturgie des Heures, il convient de mettre de côté toutes les images que nous en avons, toutes les expériences que nous avons vécues ici ou là, pour revenir à la source même de ce qui la constitue prière de l’Église.

La source première de la prière des Heures est Dieu lui-même. Dieu qui veut se faire connaître à chacun d’entre nous et se faire connaître comme Sauveur. L’œuvre de salut, accomplie en Jésus Christ, se réalise pour nous aujourd’hui dans la liturgie, car c’est en elle que « s’exerce l’œuvre de notre rédemption[1] ».

Ainsi, la liturgie des Heures, si elle répond au commandement du Seigneur de « prier sans cesse », est, en premier lieu, le temps où Dieu continue, en nous et à travers nous, d’exercer son œuvre de salut. En consentant à cette œuvre, commencée lors de notre baptême, nous sommes emportés par l’Esprit dans le mouvement d’expansion du mystère pascal – en nous et autour de nous – auquel participe la prière des heures. Il convient de se demander comment, à travers l’ordonnance rituelle des heures, la prière nous met en contact avec ce mystère de salut et comment, par là même, elle devient « source de piété et aliment de la prière personnelle » ainsi que le note la constitution sur la liturgie[2].

Aliment de prière personnelle

Souvent nous disons : « Je ne sais pas prier » ou « comment faire pour prier ? » tenant le même discours que les disciples devant Jésus : « Seigneur, apprends-nous à prier[3]. »Or l’Église, dans la liturgie des Heures, nous donne une « méthode » de prière éprouvée par des siècles de pratique.

La liturgie des Heures est pédagogue :

  • elle éduque à la foi par son contenu objectif,
  • elle construit la mémoire croyante par la répétition,
  • elle élargit la prière aux dimensions du monde.

Par sa structure, elle forme à tous les aspects de la prière :

  • par les hymnes, elle donne avec les mots d’aujourd’hui le moyen de la contemplation des mystères célébrés,
  • par les psaumes, elle procure les mots de la prière sans en évacuer aucun,
  • par l’écoute de la parole, elle approfondit la connaissance du mystère pascal,
  • par l’intercession, elle permet un décentrement de soi vers les autres.

Par sa mise en œuvre, elle apprend la respiration spirituelle :

  • par le chant, elle permet un dépassement de soi,
  • par l’alternance psalmique, elle manifeste l’appartenance à un corps composé de divers membres en dialogue,
  • par l’écoute, elle s’ouvre à la parole des autres et surtout du Tout Autre,
  • par le silence, elle dilate un espace où l’Esprit fait son œuvre de grâce,
  • par les attitudes extérieures et intérieures, elle nous tient au cœur de l’incarnation, totalement homme, totalement ouvert à Dieu.

Tous ces éléments font de la prière des Heures un lieu d’une authentique expérience spirituelle, non pas réservé à une élite de « parfaits », mais ouvert à tous pour la simple raison que Dieu offre son salut à tout homme.

Un don à recevoir

La prière, quelle qu’en soit la forme, est le lieu d’une rencontre avec Dieu où, nous mettant à son écoute, nous prenons la décision de vivre en accord avec sa parole libératrice. La liturgie des Heures nous donne les mots pour vivre cette expérience.

Nous n’inventons rien, nous recevons tout, comme nous avons reçu la vie au premier jour de la création. Le dialogue instauré entre Dieu et son peuple, dont nous sommes les membres, s’effectue à partir de la parole de Dieu. Nous parlons à Dieu avec les mots qu’il nous donne et cette parole que nous lui adressons vient, comme en retour, nous toucher au cœur. Autrement dit la parole que nous chantons est la Parole que Dieu nous donne pour nous apprendre qui il est et quelles sont ses manières de vivre.

Nous recevons les mots qui, peu à peu, transforment notre langage devant Dieu, mais nous recevons aussi la structure qui nous enseigne le mouvement de la prière chrétienne.

Ce qui vient en premier lieu est la louange. Une longue louange déployée sous diverses formes ; l’hymne pétrie d’Écriture, mais passée au filtre de la vie de l’Église et actualisée pour le monde d’aujourd’hui ; les psaumes et les cantiques. Ce faisant, nous apprenons à nous détourner de nous-mêmes pour contempler celui que nous célébrons dans cette heure du jour où nous nous trouvons. Ainsi au cœur de nos activités, nous jetons long regard de louange sur le Dieu qui nous sauve.

Et lorsque notre cœur a déposé ses fardeaux, la Parole peut être écoutée et entendue. Une parole, elle aussi donnée sous plusieurs formes ; quelques versets d’Écriture propres à éveiller l’attention et faciles à mémoriser ; le cantique évangélique de Zacharie, Marie ou Syméon qui nous rappelle que nous sommes sauvés ; le Notre Père qui est au cœur de l’office le lieu de la communion ecclésiale.

C’est au terme de ce dépouillement de nous-mêmes qui nous conduit intérieurement à entrer dans la volonté du Père que nous pouvons, avec le Christ, intercéder pour le monde en attente de salut.

Paul VI exprimait le désir que la prière de l’Église « imprègne, vivifie, pénètre profondément toute la prière chrétienne […] et qu’elle alimente la vie spirituelle du peuple de Dieu[4]. » C’est dans la simplicité de la répétition que nous découvrons la profondeur du mystère de la prière des Heures qui nous fait tenir debout avec le Christ devant Dieu, Épouse unie par la louange à son céleste Époux intercédant pour le salut du monde.

Que votre âme s’accorde à votre voix

Pour conclure, écoutons simplement ce que dit la Présentation générale de la Liturgie des Heures : « Pour que cette prière appartienne en propre à chacun de ceux qui y participent, pour qu’elle soit source de piété et de la grâce divine dans toute sa richesse, et aussi aliment d’oraison personnelle et d’action apostolique, il faut que dans son accomplissement digne, attentif et fervent, l’âme s’accorde avec la voix. Que chacun s’applique à coopérer avec la grâce d’en haut pour ne pas la recevoir en vain. En cherchant le Christ et en pénétrant toujours plus intimement dans son mystère par la prière, que tous louent Dieu et lui présentent leurs supplications dans le même esprit qui animait la prière du divin Rédempteur lui-même. » Ainsi prière la liturgie des Heures, c’est entrer dans la prière du Christ, source de grâce personnelle et d’action apostolique : N’est-ce pas l’activité la plus pertinente pour un chrétien, aujourd’hui ?

Article extrait de Voix Nouvelles n °72
Par Bénédicte Ducatel, Collaboratrice à Magnificat

[1]. Constitution sur la liturgie, n° 2.

[2]. Constitution sur la liturgie, n° 90.

[3]. Lc 11, 1.

[4]. Laudis canticum, Constitution apostolique promulguant l’office divin restauré par décret du 2e concile du Vatican, 1er novembre 1970.

Approfondir votre lecture

  • Vidéo : Présentation des Journées nationales du SNPLS des 10 et 11 mai 2023

    Les journées nationales du SNPLS (Service national pour la pastorale liturgique et sacramentelle) 2023 sont organisées à Paris, à La Grande Crypte, mercredi 10 mai et jeudi 11 mai 2023. Pour en savoir plus sur cet évènement, cliquez ici. Bernadette MÉLOIS, directrice du SNPLS, présente les journées nationales du SNPLS qui rassembleront exceptionnellement les acteurs […]

  • La liturgie des Heures : un don de l’Église

    La prière est au cœur de la vie chrétienne et beaucoup donne, chaque jour, un temps plus ou moins long à la prière. Mais de quoi parlons-nous lorsque nous employons l’expression la « Prière de l’Église » ?

  • Repères théologiques sur le Missel romain

    Le Missel n’est pas un livre d’instructions. Il n’est pas non plus le livre du prêtre. « Il ne suffit pas de suivre matériellement les indications du Missel pour que jaillisse l’action de grâce unanime de l’Église ».