Fleurir Marie

8 octobre 2011 : Diacres assistant à l'ordination de sept nouveaux diacres permanents en la Cath. Notre-Dame, Paris (75), France. October 8th, 2011 : Ordination of permanent deacons, Notre Dame Cath., Paris (75), France.

8 octobre 2011 : Diacres assistant à l’ordination de sept nouveaux diacres permanents en la Cath. Notre-Dame, Paris (75), France.

Par Marie Jeanne Ribier

Que dire sur Marie ?

Il y a tant de choses et tant ont été proclamées, chantées par une multitude : « Toutes les générations te diront bienheureuse ! »
Les litanies déclinent sans fin les sentiments d’admiration, d’amour, de reconnaissance : « comblée de grâce », favorisée de Dieu : ce terme qui, en hébreu, nous renvoie à la Bien-aimée, la « favorisée » du Cantique des cantiques…

Marie est sujet d’un investissement affectif très fort, et deux axes de réflexion se présentent spontanément à moi : d’une part tout ce qui tient à la piété populaire, véritable inflation mariale sentimentale (mais à laquelle Vatican II a mis un point d’arrêt), et d’autre part, ce travail des théologiens en continuelle recherche, cette quête œcuménique du groupe des Dombes (1937…)

Il est certain que l’aspect maternel de Marie attire et rassure, loin des échanges complexes des théologiens. Et les fêtes mariales se déroulent, avec bonheur tout au long de l’année, dès le premier janvier : Marie, mère de Dieu jusqu’en décembre avec l’Immaculée Conception, en passant par le point d’orgue somptueux de l’Assomption (la Dormition chez les orthodoxes) dans l’éblouissement du plein été…
Marie est notre sœur par le lien de la nature, elle a vécu de foi, comme nous, jusqu’à l’épreuve de la croix, et « ils ne comprenaient pas ce qu’il leur disait » (Luc 2,50)

Marie s’est présentée elle-même comme « la servante du Seigneur » (Luc 1,38) Il ne s’agit plus alors des privilèges d’une « mariolatrie », mais de la vierge d’Israël qui représente les pauvres, la servante de l’Annonciation, la mère de famille qui a couru les risques et les épreuves liées à l’enfance de Jésus, vivant à Nazareth une existence ordinaire.
Parce que l’événement était incompréhensible (la nativité), dira saint Bernard, le « oui » de Marie est d’abord une audace. Oui, Marie est bien la femme du Magnificat, si révolutionnaire car il renverse l’échelle des valeurs de la société : Nous le chantons « pieusement » sans y voir son appel à changer le monde !

Cependant, il n’y a pas d’évangile selon sainte Marie, et saint Luc insiste sur ses nombreux silences.
Marie est la figure de la femme qui partage notre condition humaine. Eve et Marie sont toutes deux nommées « femme » dans l’Écriture.
Mais comment ne pas déplorer cette recherche du merveilleux qui nous guette tous plus ou moins, cette ruée vers des lieux d’apparitions non reconnus par l’Eglise, cette ‘adoration’ qui n’est due qu’à Dieu !

Le mois de Marie, en mai, le mois du rosaire, en octobre, les foules qui se pressent rue du Bac, ne réalisent-elles pas, en définitive, la vocation même de Marie : Nous conduire à son fils ? Le culte marial n’est pas un but en soi, qu’il soit chemin vers le Christ. L’iconographie traditionnelle montre toujours Marie portant son jeune enfant dans les bras, ou à coté de son corps meurtri, déchirante piéta.

Rappelons ce mot merveilleux, le premier adressé par Dieu à l’humanité en la personne de Marie : Réjouis-toi !

Alors, comment fêter « floralement » Marie puisque tel est notre service d’Eglise ?

Certes cela dépend de la particularité de cette fête précise, de son calendrier et des ressources locales à notre portée dans notre environnement. La composition sera ainsi le reflet de ce que nous vivons dans le quotidien de la vie…

Mais une grande fête « carillonnée » justifiera la magnificence de certains éléments employés pour donner un aspect particulièrement festif et que leur rareté mettra tout spécialement en valeur.
Gardons-nous cependant de multiplier les compositions qui dispersent l’attention, au détriment de l’essentiel : une seule, assez importante, tout en s’ajustant à l’espace, sera réalisée avec grande attention quand au choix des éléments, des couleurs et, bien sûr de l’emplacement.

La paroisse peut décider de déplacer et mettre en évidence une belle statue de vierge dont le style déterminera celui du bouquet. Les fidèles, très attachés affectivement à leur église et à Marie sont en général heureux de fournir les fleurs ; la difficulté est alors de faire une composition harmonieuse avec des éléments apportés (et des attentes) disparates…

Comme pour tout fleurissement, il ne faut pas « copier » un modèle, fut-il de grand maître et remarquable. Il doit être le résultat de notre prière, de notre créativité, plus précisément de notre entière disponibilité avec le désir de porter l’action de grâce de l’assemblée.

Il faut éviter le piège de l’allégorie : tout élément employé ne représente que lui-même, ainsi telle fleur n’est que cette fleur et ne peut absolument pas représenter un personnage… Mais parfois la frontière entre symbole et allégorie est subtile …

Restons dans le symbole, c’est le langage liturgique.

« Présence de l’absence » selon la définition du symbole par Lacan (moine, frère du psychanalyste) le bouquet est cette partie présente à nos yeux, qui évoque cette seconde partie invisible, absente, vers laquelle il doit nous conduire…

Comment évoquer Marie ?

Par le bleu et le blanc, mais ce n’est pas un dictat !

En iconographie, le bleu est la couleur de la Sagesse, symbole du silence, de la méditation. Mais ce n’est pas exclusif, et toutes autres couleurs sauront chanter Marie ! Tels le jaune lumineux, et le rose joyeux à l’approche d’une grande fête (comme celle des dimanches de Gaudete et de Laetare) ; de même celui qui évoque la « rose mystique » des litanies de la Vierge.

Le rouge tonique du feu de l’Esprit Saint peut éventuellement y trouver sa place « L’Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te couvrira de son ombre » (Lc 1,35)
Une couleur n’est jamais anonyme, elle réagit en fonction de la lumière et des autres couleurs environnantes, que ce soit celle d’un tapis, d’un vitrail (changeant selon l’heure du jour, et de la nuit) ou de tout autre élément.

Le blanc est un atout précieux pour assurer une transition entre deux couleurs disharmonieuses, il introduit un espace de clarté, crée une plage de respiration…

Quoi qu’il en soit, il est essentiel (et liturgique) de s’accorder aux rythmes de la nature, à la saison… Rester naturel, et se souvenir que dans la nature le vert est abondant !

Quels éléments choisir pour cette réalisation ?

Ils sont multiples et seront privilégiés pour telle fête bien précise.
Pensons aux lys immaculés, aux arums dont la disposition « en dialogue » animera la composition, aux palmes de la gloire, mais aussi à des éléments simples et humbles comme la fougère, la mousse, les lianes qui embrassent l’espace, et ces graminées aux frémissements immatériels…

Et les formes ?

Elancées pour l’Assomption ; ouvertes pour le oui de l’annonciation
Ce peut-être cela, mais aussi (et c’est heureux), tout autre chose, selon l’espace, le contenant, l’emplacement, l’inspiration et les conditions pratiques de la réalisation.

Parmi toutes ces propositions il faut faire un tri sévère, avoir une réflexion censée, le courage de ne conserver que le seul nécessaire et surtout ne pas vouloir expliquer ni commenter la réalisation. L’offrir à Marie, à l’assemblée, dans l’anonymat.

Que Marie soit fêtée ! Que l’assemblée, peuple de Dieu soit un même corps, un seul souffle pour chanter la mère de Dieu et la nôtre en Christ :

Réjouis-toi, Marie, comblée de grâces,
le Seigneur est avec toi
tu es bénie parmi toutes les femmes
et Jésus, ton enfant est béni.
Marie, mère de Dieu
prie pour nous,
pécheurs,
maintenant et à l’heure de la Rencontre.

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