Guérison et Salut

4 Mars 2014: Catherine,bénévole de l'aumônerie oecuménique, avec un patient hospitalisé en gériatrie. Hôpital des Diaconesses. Paris (75) France. March 4, 2014: 2014: Ecumenical chaplaincy of Deaconess Hospital. Paris (75), France.

4 Mars 2014: Catherine,bénévole de l’aumônerie oecuménique, avec un patient hospitalisé en gériatrie. Hôpital des Diaconesses. Paris (75) France.

Par Jacques Rideau, Prêtre du diocèse de Luçon, ancien Directeur du SNPLS

On sait le déplacement qui s’est fait depuis Vatican II, et selon ses recommandations (Constitution sur la Liturgie n°73), de l’extrême-onction donnée aux mourants vers la revalorisation de l’onction pour les personnes atteintes d’une maladie grave ou l’affaiblissement de la vieillesse. Par ailleurs, dans nos sociétés développées, alors que les moyens de lutte contre la maladie sont toujours plus performants, les professionnels de la santé cherchent à mieux prendre en compte la personne du malade au-delà de la technicité des soins.

C’est sur ce fond que l’on peut interroger le lien étroit entre guérison et salut que l’on trouve dans les évangiles comme dans le sacrement de l’onction des malades.

Dans le ministère de Jésus

La guérison des malades tient une place de choix dans le ministère de Jésus. Elle est la manifestation privilégiée du Règne de Dieu qui vient par Jésus et en lui. Si les évangiles nous ont gardé le souvenir de la guérison de tel lépreux, tel paralysé, tel infirme, ils mentionnent aussi, comme en refrain, les guérisons sans nombre des malades :

 « Il proclamait la Bonne Nouvelle du Règne de Dieu et guérissait toute maladie et toute infirmité parmi le peuple. On lui amena tous ceux qui souffraient, en proie à toutes sortes de maladie et de tourments…il les guérit. » Mt 4, 23-25.

Vers la résurrection

Ainsi, l’annonce la Bonne nouvelle du Règne de Dieu et la guérison de toute maladie sont intimement liées. A plusieurs reprise il nous est dit que Jésus guérit par le toucher ou en imposant les mains. En lui, la puissance créatrice de Dieu est à l’œuvre ; la guérison est une délivrance et l’émergence de la création nouvelle. C’est dans cette perspective que l’on peut comprendre dans plusieurs récits de guérisons l’usage du verbe « lever », « relever », ce même verbe employé pour désigner la résurrection : Jésus fait lever la belle mère de Pierre (Mc 1, 31) ; il ordonne au paralytique, « Lève-toi » (Mc 2, 9) comme il se lèvera d’entre les morts. Ainsi, la guérison a déjà part avec la résurrection.

L’entrée dans le Salut

Mais les récits évangéliques insistent aussi sur la foi. « Va, ta foi t’a sauvé ! » Le récit qui conjugue la résurrection de la fille de Jaïre et la guérison de l’hémorroïsse est exemplaire (Mc 5, 21-43). C’est la foi qui pousse la femme à vouloir toucher le manteau de Jésus, cette foi que Jésus reconnait et confirme « Ma fille, ta foi t’a sauvée ». Dans sa faiblesse, l’infirme ou le malade s’en remet totalement à la parole de Jésus et à la puissance qui est à l’œuvre en lui. Comme en un baptême, Jésus fait passer du côté de la création nouvelle, délivrée du mal et de la mort, celui qui croit en lui, celui qui sans appui humain s’en remet à lui. Délivrance du mal, la guérison apparait donc comme l’entrée dans le salut, comme passage du côté de la vie que Dieu veut pour ses enfants.

Dans le mystère de sa Pâque

Jésus connait la souffrance

Reste à contempler le cœur de ce mystère. Au terme d’un résumé du ministère de guérison de Jésus, l’évangile de Matthieu (8, 34) conclut par ces mots du prophète Isaïe (53, 4) : « Il a pris nos infirmités et s’est chargés de nos maladies ». Celui qui guérit n’est pas étranger aux malades. Car c’est notre chair de péché, notre condition de faiblesse de corps et d’esprit qu’il a voulu prendre. Il a connu en sa chair la souffrance physique et morale des hommes dans les luttes et les défaites de la vie. Il a vécu le combat contre ce mal qui défigure les hommes, un combat à la vie, à la mort. Et c’est « avec un grand cri et dans les larmes » que, rejeté par les hommes et abandonné de Dieu, « il a offert prières et supplications à celui qui pouvait le sauver de la mort » (He 5, 7).

L’offrande libre

Les lépreux et les malades avaient crié vers lui : « Fils de David, sauve-nous ! » A l’heure de sa mort, il prenait tous ces cris dans le sien ; en parfaite obéissance et pur amour du Père, dans le don total d’une confiance absolue, il déposa sa vie entre les mains du Père : « Père, en tes mains, je remets mon esprit » (Lc 23, 46). Il faisait ainsi de sa mort le don de sa vie – « Ma vie nul ne la prend, c’est moi qui la donne » (Jn 10,18)- une offrande pure où le Père était enfin reconnu et aimé comme Père, source de toute vie et de tout amour. Jésus a fait de sa mort le retournement décisif de l’humanité sur les chemins de la vie éternelle, retournement accompli dans la gloire de sa résurrection.

Don de l’Esprit pour le malade et pour l’Église

Il faut remarquer comment ce mystère évangélique de la guérison et du salut est tout entier rassemblé dans la parole sacramentelle qui accompagne l’onction faite sur le front et les mains du malade. L’Église demande pour lui la libération des péchés, le salut et le relèvement. Si l’Église n’a jamais exclu que l’effet du sacrement puisse être la guérison, la grâce ne s’y réduit pas. La maladie grave, la vieillesse qui débilite les forces physiques et psychiques, remettent l’homme devant sa précarité fondamentale, devant l’horizon de sa mort. La grâce du sacrement est don de l’Esprit qui réconforte dans l’épreuve de la maladie. Ce don lui donne de placer sa vie éprouvée et menacée par la maladie dans la communion au Christ, communion au dynamisme par lequel Jésus a fait de son épreuve et de sa mort un don de soi et une ouverture radicale au Père, source de toute vie. Ainsi le salut sera manifesté en lui, et dans la manière dont il vivra sa maladie, Dieu sera glorifié comme le Dieu des vivants. Ainsi le malade édifie l’Église, Corps du Christ.

Ceux et celles qui ont vécu ce sacrement ou qui en ont reçu le témoignage savent que ce réconfort de l’Esprit et ce salut de Dieu dans la communion à son fils ne sont pas des mots vides de réalité spirituelle.

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J. Rideau – Guérison et salut

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