Baptistère, cuve baptismale et usage liturgique depuis Vatican II

Par P. Norbert Hennique, Département Art sacré

S’il est un « parent pauvre » des fruits du Concile Vatican II, c’est bien le baptistère

Où en sommes-nous aujourd’hui alors que dans les Chroniques d’Art sacré de 1995 (1) le P. Louis-Marie Chauvet posait déjà la question : « On a fait beaucoup d’efforts pour améliorer la qualité esthétique des lieux et des objets qui concernent l’eucharistie. Pourquoi ne ferait-on pas preuve d’autant d’imagination en ce qui concerne les lieux et les objets du baptême

La présence d’un baptistère en tant que lieu est explicitement demandée pour signifier que le baptême est le point de départ de toute la vie chrétienne, le nouveau baptisé devenant « membre du peuple de Dieu » (2) : « Toutes les églises cathédrales et toutes les églises paroissiales doivent avoir leur propre baptistère, endroit où jaillit la fontaine baptismale, ou bien où se trouvent les fonts baptismaux »» (3).

De même que l’autel, l’ambon, le lieu de la pénitence et de la réconciliation jouent le rôle d’ « espace-mémoire » ainsi le baptistère rappellera à chacun le mystère de son entrée dans l’Église et dans la communion avec Dieu.

Concernant son emplacement, les préliminaires des rituels du baptême précisent « Qu’il soit situé dans une chapelle ou bien dans un autre endroit de l’église, bien en vue des fidèles, l’aménagement du baptistère doit être adapté à la participation d’un grand nombre » (4).

L’indication portant sur « la participation d’un grand nombre » aura pour conséquence l’aménagement d’un lieu assez vaste au point que l’on pourra choisir un autre lieu que le baptistère « lorsque la chapelle des fonts baptismaux est trop exiguë pour recevoir tous les catéchumènes ou toutes les personnes présentes. » (8)

Baptêmes à la paroisse d’Istres au diocèse d’Aix et Arles (c) MarieJo Clain

Point besoin de longues explications pour comprendre la présence indispensable des représentants de toute la communauté chrétienne locale au moment de l’accueil d’un de ses nouveaux membres ! « Il faut que, dans la célébration du baptême, le peuple de Dieu, représenté non seulement par les parrains, les parents et les proches, mais encore, autant qu’il est possible, par des amis, des familiers, des voisins et quelques membres au moins de l’Église locale, joue un rôle actif. » (5). Il n’est pas si loin le temps où, après la grand’messe, le curé de la paroisse invitait les fidèles à sortir de l’église sans tarder pour que la célébration d’un baptême puisse avoir lieu…

La signation, en présence de la communauté chrétienne, est formellement mentionnée : « La communauté chrétienne vous accueille avec joie. En son nom, je vous marque de la croix, le signe du Christ, notre Sauveur » (6).

L’entrée dans la communauté chrétienne est reprise dans les notes doctrinales et pastorales qui demandent d’organiser « des célébrations communes dans lesquelles on baptisera le même jour, les enfants nés récemment » et « de ne pas célébrer deux fois le baptême le même jour, dans la même église, sauf pour un juste motif… » (7)

Particulièrement explicite dans le rituel du baptême des Petits Enfants, le déplacement symbolique qui a lieu depuis l’accueil à l’entrée de l’église jusqu’à l’autel. « Un jour, ils approcheront de la table du Seigneur pour prendre part à l’eucharistie… » (9). C’est en ce sens qu’il ne convient pas de placer un baptistère derrière l’autel…

Comment faire concrètement ? A cette interrogation, il n’y a pas une seule réponse valable pour tous les lieux même si, idéalement, la cuve baptismale devrait être inamovible…

Parmi les éléments de discernement, il est essentiel que la cuve baptismale soit assez grande pour rendre possibles les baptêmes autrement que par ablution. « Le rite d’immersion signifie plus clairement la participation à la mort et à la résurrection du Christ » (10). « Le rite de l’eau doit être pleinement mis en valeur… Il ne s’agit pas d’un rite de simple purification… » (11). Sa mise en œuvre liturgique passe par le discernement des moyens à utiliser et par la « vérité des signes liturgiques » qui n’est pas de l’ordre du théâtre ou du spectacle : par l’eau du baptême s’opère une relation transformante.

« Les lieux du baptême en France, dans la majorité des cas, ne font pas le poids, loin s’en faut, par rapport au mystère que l’on y célèbre ; il est toujours possible de mieux faire » (1). Que faut-il penser aujourd’hui de ces propos d’il y a 20 ans ?

Baptêmes à la paroisse d’Istres au diocèse d’Aix et Arles (c) MarieJo Clain

1) Chroniques d’Art sacré 1995, n° 44

2) Lumen Gentium n°9

3) Livre des Bénédictions n° 833

4) Rituel du Baptême des Petits Enfants n° 25

5) Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes n° 7

6) Rituel du Baptême des Petits Enfants n° 75

7) Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes n° 27

8) Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes n°26

9) Rituel du Baptême des Petits Enfants n° 105

10) Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes n° 22

11) Rituel de l’Initiation Chrétienne des Adultes n° 209

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