Lieux, temps, rites : difficultés ressenties lors de la Semaine sainte

18 avril 2014 : Lecture de la Passion le Vendredi Saint à la paroisse de Notre-Dame du Val (77), France. April 18, 2014: Way of the Cross on Good Friday travelling to the parish of Our Lady of the Valley, Bussy-Saint-Georges, France.

18 avril 2014 : Lecture de la Passion le Vendredi Saint à la paroisse de Notre-Dame du Val (77), France.

Par Marie-Pierre Ritzenthaler-Thiebo, Déléguée provinciale de PLS du diocèse de Strasbourg

Plus de cinquante ans après la promulgation de la Constitution sur la liturgie, les célébrations de la Semaine Sainte ne suscitent plus l’enthousiasme des fidèles des années 70. Est-ce la conséquence d’une baisse générale de la pratique ? N’est-ce pas aussi la conséquence d’une compréhension incomplète des rites et d’une organisation pastorale défaillante ?

Une question de lieux

Avec la multiplication des regroupements paroissiaux, choisir le lieu où se dérouleront les célébrations de la semaine sainte est un casse-tête. Il faut tenir compte des distances à parcourir, du nombre de fidèles réunis, des attentes des uns et des autres. L’unité de ce temps liturgique, celle du mystère célébré, n’est-elle pas mise à mal par l’organisation tout au long de ces jours, d’un circuit à travers différentes églises ? Ne risque-t-on pas de « perdre » des fidèles qui attendront la célébration célébrée « chez eux » ? Que dire, quand pour honorer telle ou telle paroisse, on en vient à célébrer dans la salle polyvalente, parce que l’église est trop petite, ou trop froide, ou en travaux ? Que faire, face à des communautés qui régulièrement, célèbrent le jeudi saint dans un lieu, le vendredi saint dans un deuxième, et la vigile pascale dans un troisième ? Des églises attribuées à la convivialité, à la Passion, à la fête ?

Une question de temps

Une coexistence parfois difficile avec les vacances scolaires

Lors du weekend pascal, les vacances scolaires dispersent les paroissiens. A cette occasion, certains d’entre eux mettent leur pratique des sacrements aussi en vacances…

Des horaires de célébrations parfois inopportunes

Tenir compte des contraintes professionnelles et familiales amène parfois les responsables pastoraux à faire des choix contraires à tout bon sens, comme célébrer la vigile pascale alors qu’il ne fait pas encore nuit.

Apprivoiser la durée de certaines célébrations

On assiste parfois à des célébrations amputées de rites ou de lectures. La vigile pascale, par exemple, perd son caractère de veillée si on refuse de déployer la longue liturgie de la Parole au cours de laquelle les chrétiens relisent l’histoire du Salut.

Difficulté à faire saisir l’unité de la semaine sainte à des fidèles occasionnels

Enfin, il s’agit aussi d’inviter les chrétiens à entrer dans une semaine où l’Église donne à vivre en peu de jours, un grand nombre de célébrations différentes. Les fidèles plus occasionnels n’y voient plus un itinéraire à vivre, mais une palette de propositions parmi lesquelles ils font un choix.

Une juste mise en œuvre des rites

Chaque célébration de la semaine sainte est originale dans ses rites. Et c’est par la répétition de ces rites que d’année en année, les chrétiens entrent toujours plus au cœur du mystère pascal. Nous en citerons quelques-uns :

Les processions

Dans les célébrations de la Semaine Sainte, nous sommes invités à vivre une succession de processions qui ne sont pas des marches désordonnées.

Le dimanche des Rameaux, palmes à la main, les fidèles marchent derrière la croix, ornée d’un rameau.

Lors de la vigile pascale, ils marcheront derrière le cierge pascal. Il ne s’agit pas de devancer la croix ou la lumière. Cette discipline symbolise la marche que nous faisons à la suite du Christ.

Célébration de la Cène

Bien qu’une grande et belle table dressée soit signe de partage et de convivialité, il y a des lieux qui s’y prêtent moins : attention à la mise en scène !

Lavement des pieds ou lavement des mains

Parce qu’il n’est pas pratiqué dans la vie courante, si ce n’est dans les hôpitaux et les maisons de retraite, le geste du lavement des pieds surprend, au point que certains le remplacent par le lavement des mains …

L’adoration de la croix le vendredi saint

Il y a des lieux où l’on ne comprend plus la longue procession des fidèles pour s’avancer vers la croix, et où seuls le prêtre et les autres ministres vénèrent la croix.

La célébration des sacrements de l’initiation chrétienne au cours de veillée pascale

Même si la nuit pascale est le temps qui convient à l’initiation des catéchumènes, cela ne va pas sans causer des difficultés. D’une part, les familles de catéchumènes sont rarement familières des célébrations chrétiennes, a fortiori d’une vigile pascale dont la durée peut les décourager. D’autre part, les pratiquants redoutent l’étirement démesuré d’une célébration déjà longue.

Lectures

Les nombreuses lectures de la semaine sainte rebutent parfois les fidèles, au point qu’ici ou là, on voit des textes supprimés ou raccourcis. Certains textes de l’Ancien Testament sont rudes à entendre (Is 50). D’autres sont longs, à l’image de la Passion, qui est lue non seulement le vendredi saint mais aussi le dimanche des Rameaux et de la Passion. Parfois, ce dimanche est réduit aux Rameaux

 Cette énumération des difficultés ressenties lors de la semaine sainte est loin d’être exhaustive. Il y a aussi des prises de parole et des rites annexes surajoutés, émanant d’une mauvaise compréhension de ce que le Concile a nommé une « participation consciente, pieuse et active » (SC 48) des fidèles à la liturgie. La Lettre circulaire de la Congrégation pour le culte divin sur la préparation et la célébration des fêtes pascales, suggère, quant à elle, que

« Sans aucun doute, les difficultés de ce genre découlent avant tout d’une formation, jusqu’ici insuffisante, du clergé et des fidèles sur le mystère pascal en tant que centre de l’année liturgique. »

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