La liturgie des Heures, œuvre du Christ et de l’Église
Que la liturgie des Heures soit la prière officielle de l’Église peut faire croire à certains qu’elle est impersonnelle et ritualiste. Il est vrai qu’elle existe en sa structure avant de devenir la prière de chacun et que nous la recevons d’une Église de priants qui nous a précédés. En cela même, elle nous fait entrer dans l’incomparable trésor spirituel.
Prière du Christ
La prière de l’Église « participe de la piété du Fils unique envers le Père et de la prière que, durant sa vie sur terre, il a exprimée par la parole et qui, à présent, se perpétue sans interruption dans toute l’Église et en tous ses membres, au nom et pour le salut de tout le genre humain9. »
Par ces mots, l’Église montre qu’elle a toujours tenu la liturgie des Heures pour la prière du Christ lui-même. Plus encore, elle ose une formule d’une force insurpassable : « celui qui psalmodie dans la liturgie des Heures », le fait « en tenant la place du Christ lui-même[10] ». En imitant la formule de saint Paul, on pourrait dire : dans la liturgie des Heures, « ce n’est plus moi qui prie, c’est le Christ qui prie en moi[11]. » D’où la dignité de la prière de l’Église.
Prière ecclésiale
Celui qui prie la Prière de l’Église accepte de se dessaisir un peu de lui-même : il n’a pas choisi l’hymne, les psaumes, la Parole, etc. Mais ne peut-on pas dire qu’une personne est d’autant plus chrétienne, et donc que le chrétien est davantage lui-même, lorsqu’il accepte d’être ainsi incorporé au Christ et à l’Église qui est son corps (cf. Co 1, 18) ? Tout en se laissant dessaisir d’une part de ses choix et de ses sentiments personnels, il accède à une plus grande communion, non seulement dans le Christ et l’Église, mais avec toute l’humanité au nom de laquelle il prie[12].
Prière de louange
« Par la louange des Heures offerte à Dieu, l’Église s’associe au divin chant de louange chanté de toute éternité dans les cieux ; en même temps, elle perçoit un avant-goût de la louange céleste, décrite par saint Jean dans l’Apocalypse … Cette liturgie céleste, les prophètes l’ont contemplée à l’avance dans la victoire du jour sans nuit, de la lumière sans obscurité : « Tu n’auras plus le soleil comme lumière le jour, la clarté de la lune ne t’éclairera plus, mais le Seigneur sera ta lumière éternelle » (Isaïe 60, 19 ; cf. Apocalypse 21, 23.35)… » Le renouvellement du monde est irrévocablement acquis et, en toute réalité, anticipé dès maintenant » (Lumen Gentium n° 48). Ainsi, par la foi nous sommes instruits même sur le sens de notre vie temporelle, pour vivre, avec toute la création, dans l’attente de la manifestation des fils de Dieu. Dans la Liturgie des Heures, nous proclamons cette foi, nous exprimons et nourrissons cette espérance, nous participons en quelque sorte à la joie de la louange perpétuelle et du jour qui ne connaît pas de crépuscule. » (PGLH, n°16)
Au-delà du cri : « Seigneur, ouvre mes lèvres », « Dieu, viens à mon aide ! » par lequel s’ouvre la prière des Heures, au-delà des cris, qui traversent les psaumes et qui font naître les intercessions, la caractéristique fondamentale et la fonction première de la prière de l’Église est « que tout le déroulement du jour et de la nuit soit consacré à la louange de Dieu[13] ». D’ailleurs, le premier office de la journée ne porte-t-il pas le nom de « Laudes » ? Ce qui signifie « louange » et exprime l’attitude filiale par excellence, l’attitude de la créature tournée vers son Créateur. Le Christ lui-même nous associe au chant de louange qui monte de toute éternité dans les cieux et « nous participons en quelque sorte à la joie de la louange perpétuelle et du jour qui ne connaît pas de crépuscule[14] ».
Le Christ est le premier à chanter les louanges de son Père, mais, parce que nous sommes son Corps, la liturgie des Heures est bien la prière de l’Église tout entière. Comme le baptême nous donner par à la vie du Christ, la liturgie des Heures nous donne part à sa prière qui, peu à peu, nous conforme à son image et ressemblance.
Article extrait de Célébrer n°307
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[1]. Hymne de la Pentecôte, Esprit qui planes sur les eaux.
[2]. Hymne de la Pentecôte, Amour qui planais sur les eaux.
[3]. Hymne de l’Avent, Es-tu celui qui doit venir.
[4]. Hymne du dimanche matin, Soleil des âges.
[5]. Hymne, Ô toi, l’au-delà de tout.
[6]. Hymne du temps pascal, Lumière enfouie sous le boisseau.
[7]. Hymne du Carême, Avec toi nous irons au désert.
[8]. Hymne pour l’Ascension, Christ est parti sans nous quitter.
[9]. PGLH, n. 6.
[10]. PGLH, n. 108.
[11]. Cf. Ga 2, 20.
[12]. cf. PGLH, n. 6.
[13]. Constitution sur la liturgie, n. 84.
[14]. PGLH, n. 16.