La liturgie nous éduque à vivre en frères

Geste de paix lors de la messe

8 janvier 2017 : Geste de paix lors de la messe des Peuples à la paroisse Notre Dame de Beauregard. La Celle Saint Cloud (78), France.

Par Joël SérardDiacre permanent et responsable de Pastorale liturgique et sacramentelle du diocèse de Coutances et Avranches

Le motif principal qui conduit Paul à adresser sa première lettre aux Corinthiens tient aux conflits qui minent la communauté en prière : « Puisque j’ai commencé à vous faire des critiques, je ne vous félicite pas pour vos réunions : elles vous font plus de mal que de bien. Tout d’abord, quand votre Église se réunit, il paraît qu’il subsiste parmi vous des divisions … » (1 Co 11, 17-18) Et l’apôtre de rappeler le lien vital entre la célébration de la Cène et la communion fraternelle au sein du Corps du Christ.

L’unité

Comme quoi, les conflits ont existé dès les premiers temps de l’Église ! Dans la liturgie les divisions paraissent plus criantes, quand ce n’est pas la liturgie elle-même qui est la cause principale de scissions dans le Corps. L’Église du XXIe siècle n’a ici rien à envier aux difficultés des chrétiens de Corinthe. Mais l’unité du Corps, si difficile à vivre hier comme aujourd’hui, prend un caractère prophétique, quand elle refuse le communautarisme et s’oblige à tenir ensemble malgré les tensions et les différences. L’Église perd son âme si elle devient une collection de chapelles où chacun viendrait prier selon ses seuls goûts personnels.

Une école de fraternité

À ce titre, la liturgie est une école de fraternité. La messe chrismale est le plus bel exemple de cette communion dans la diversité : prêtres, diacres, religieux et fidèles laïcs se rassemblent autour de l’évêque et font corps. Le presbyterium qui renouvelle les promesses sacerdotales manifeste la communion des prêtres entre eux et avec leur évêque, quand au quotidien les tensions peuvent être réelles.

De même, la liturgie eucharistique interpelle chaque membre qui, tourné vers Dieu, doit aussi se retourner vers son frère. L’acte pénitentiel s’adresse autant à Dieu qu’aux autres.

Le geste de la communion fraternelle

Le geste de paix concrétise la double relation d’amour que le croyant entretient avec Dieu et avec ses frères :

« Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande sur l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande. » (Mt 5, 23-24).

En ce sens, même si le Missel romain précise que parfois ce geste « ne convient pas », il n’est pas facultatif. Il est le geste de la communion fraternelle.

La liturgie n’est pas une utopie qui anticiperait le ciel en nous mettant si haut qu’elle serait un déni de nos tensions humaines. L’assemblée en prière s’assume avec ses divisions : « …la médiocrité est le scandale même de l’Église. Elle est sainte, l’Église, mais faite de pauvres bougres qui volent le ciel. » (A.-G. Martimort, « L’assemblée liturgique », LMD 20, 1950/1, p. 158.)

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