Le chant dans les grands rassemblements
Par Nicolas Bucher
Si la musique adoucissait les mœurs, le choix des chants dans les grands rassemblements ne mériterait pas un article. Pour aider à cet exercice difficile, j’aborderai ici trois points essentiels : la préparation, le répertoire et la mise en œuvre. J’ajouterai au passage des idées plus personnelles, fruits d’expériences vécues ici ou là.
La préparation
Commençons par une évidence : la célébration se prépare en équipe. Responsables de liturgie et de musique entourent le président de l’assemblée dans la préparation. En fonction de l’événement peuvent se joindre à ce noyau des responsables locaux, les organisateurs de l’événement (journée diocésaine), ou les personnes concernées (ordinations). Une équipe restreinte, mais compétente, et représentative de l’événement est la première condition d’un bon choix de chants.
Le répertoire
Le choix du répertoire est fait d’équilibres rationnels et de compromis intelligents. L’écueil le plus redoutable est la « communautarisation » du répertoire. D’expérience, le CNA (Chants Notés de l’Assemblée) est un outil précieux, par son expertise, sa diversité et son statut, clairement exprimé par les évêques francophones. Cependant, on ne se privera pas d’un chant, très clairement issu de tel ou tel répertoire, qui se révélera adapté au geste ou à un commentaire au sein de la célébration, pourvu que son texte et sa musique soient de qualité !
Le panachage est, à mes yeux, la pire des solutions… Un peu de ceci, un peu de cela et – paraît-il – tout le monde est content ! Construire une célébration homogène (mais pas uniforme) est certes plus difficile que satisfaire toutes les tendances de la musique liturgique par un saupoudrage hâtif. C’est pourquoi la tâche nécessite un véritable travail d’équipe.
Un grand rassemblement est également l’occasion de promouvoir de nouveaux chants à l’échelle paroissiale, diocésaine ou nationale, à l’exemple du Gloire à Dieu (sur une basse de Haendel) célèbre grâce aux JMJ ! L’équilibre rationnel est encore de rigueur : pour un grand rassemblement, mieux vaut choisir un répertoire connu de tous auquel on joint une ou deux découvertes. Personnellement, je pense que le Saint le Seigneur ou l’anamnèse doivent être parfaitement connus de l’assemblée ; ainsi l’assemblée y participe pleinement et leur statut d’acclamations est respecté. D’expérience, je trouve qu’il en va de même pour le chant d’ouverture, l’Alléluia et le Notre Père.
La mise en œuvre
La mise en œuvre d’un chant est souvent aussi importante que le chant lui-même. Or les grands rassemblements permettent souvent de regrouper des moyens musicaux plus importants que d’habitude : chorale, instrumentistes, etc. Il faut donc tenir compte de cette situation particulière.
La participation régulière de l’assemblée tout au long de la célébration est une condition sine qua none de sa réussite. Cependant l’occasion est idéale pour promouvoir le dialogue entre les solistes, la chorale, les instrumentistes et l’assemblée. Si, « la chorale et l’organiste ne sont pas là pour se faire plaisir » (refrain célèbre !), cela n’empêche pas que l’assemblée puisse également participer par l’écoute. La chorale et l’organiste ont aussi le droit de faire plaisir à l’assemblée en interprétant un motet ou une pièce d’orgue appropriés et longuement préparés pour cette célébration particulière !
Oserais-je dire qu’en terme d’instrumentistes, je préfère souvent la qualité à la quantité et un choix approprié à une auberge espagnole. Si les instruments de musique naissent libres devant la liturgie, ils ne sont pas égaux devant les acoustiques (de la cathédrale au stade !), les mises en œuvre et les sonorisations. Prenant le risque d’être mal compris, je dirais même que quelques instruments bien accordés, bien joués et utilisés à propos sont sûrement plus aptes à inciter à la prière que d’étranges mélanges, maladroits et faux. Sans renoncer à la notion de convivialité, la musique a souvent des exigences qui la dépassent.
Enfin, il n’est pas de liturgie réussie sans une feuille d’assemblée bien conçue. C’est si simple à faire ! Quelques paroles de chant nécessaires et l’indication de la participation de l’assemblée par des caractères gras suffisent amplement. On y reproduira la partition d’un chant peu connu. Le graphisme aidera aussi les personnes ne lisant pas la musique à s’approprier la mélodie.
La musique dans les grands rassemblements est donc une alchimie simple et complexe, fragile et nourrie d’évidences ! L’assemblée a besoin d’une mémoire collective et de fondements communs, d’où l’importance d’un répertoire équilibré et bien connu. Elle est là pour s’ouvrir et découvrir. Nous devons donc la nourrir spirituellement mais aussi musicalement. Malgré leurs proportions peu habituelles, ces célébrations ont toujours un côté exemplatif, et c’est pourquoi tout ce qui la compose doit être non seulement de grande qualité mais encore réellement habité. Est-ce finalement différent d’une autre célébration ?
Télécharger l’article complet en PDF :