Lavement des pieds et pénitence, une Lecture de Saint Jean 13, 1-20.
Par Yves-Marie Blanchard, Prêtre exégète, spécialisé dans les écrits johanniques, il est professeur à l’ISL.
Non seulement la péricope du lavement des pieds (Jn 13, 1-20) constitue l’un des textes les plus commentés du quatrième Évangile[1], mais elle est parfaitement exemplaire des résultats acquis par l’exégèse historico-critique. D’une part, le texte est éminemment complexe et semble bien résulter de la combinaison de plusieurs couches rédactionnelles.
D’autre part, son interprétation ne saurait se contenter d’accumuler des lectures fragmentaires, sans prendre en compte la figure globale du texte, tel qu’il se donne à lire dans l’édition définitive.
Dans un effort de lecture « canonique »[2], soucieux d’honorer à la fois l’unité du texte achevé et la pluralité des énoncés le constituant, nous tenterons d’articuler plusieurs lectures possibles, avant de nous interroger sur une éventuelle ouverture pénitentielle, suggérée entre autres par saint Ambroise[3] mais rarement relevée par les auteurs modernes[4].
Article extrait de la revue La Maison-Dieu, n°214, 1998, p 35-50.
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[1] Pour les années 1966-1985, on pourra consulter G. VAN BELLE, Johannine Bibliography 1966-1985, BETL n° LXXXII, Louvain, 1988, p. 266-269. Depuis lors, se reporter aux index des multiples commentaires ou bien aux chroniques bibliographiques, notamment celles des Recherches de Science Religieuse assurées par X. LEON-DUFOUR puis M. MORGEN. // [2] Pour une définition de la notion de « critique canonique », voir Y.-M. BLANCHARD, « Vers un nouveau paradigme exégétique », La Théologie dans l’Histoire, F. BOUSQUET et J. DORE éd., Paris, 1997. // [3] AMBROISE DE MILAN, Des sacrements. Des mystères. Explication du Symbole, B. BOTTE éd., Paris, Éd. du Cerf, coll. « Sources chrétiennes » n° 25 bis, 1961, p. 92-97 et 172-175. // [4] Dans un article suggestif mais finalement peu connu, « L’Interprétation pénitentielle du lavement des pieds », L’Homme devant Dieu (Mélanges de Lubac) Paris, 1963, p. 75-91, P. GRELOT établit le dossier des textes patristiques et médiévaux suggérant une interprétation pénitentielle du lavement des pieds. Aussi étrange et arbitraire qu’elle puisse paraître, cette position marginale nous semble mériter d’être prise en considération. En effet, de nouvelles perspectives s’ouvrent désormais à la pratique exégétique : – d’une part, la prise en compte d’une pluralité des sens, à l’articulation des diverses couches rédactionnelles, selon un principe de non-exclusivité (ainsi, évoquer une possible lecture « pénitentielle » n’entame en rien la pertinence d’interprétations autrement explicites) ; – d’autre part, l’intérêt pour la Wirkungsgeschichte, ou histoire de l’effectuation, c’est-à-dire la reconnaissance que le texte s’enrichit de la somme des lectures produites au long de son histoire (ainsi, fixer le sens initial, voire rechercher l’intention de l’auteur, ne constituent plus l’objet premier d’une exégèse, aussi attentive à la réception du texte -lecture – qu’à sa genèse – rédaction).
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