Le tabernacle, lieu de la présence : vocabulaire et aménagement
Par Georges Bonnet, Prêtre du diocèse du Puy-en-Velay. Il a enseigné à la faculté de théologie de Lyon et est vice-président de la Commission diocésaine d’Art Sacré du Puy-en-Velay.
Le tabernacle, la tente des Hébreux par laquelle Dieu montre son soutien à son peuple, ce qui annonce l’eucharistie, est devenu, dans le culte catholique, un meuble aux aspects divers. Devant permettre la conservation digne du pain consacrée en même temps que l’exaltation de la Présence réelle, son implantation diffère selon l’époque : distinct ou non de l’autel, incorporé au retable situé dans le chœur ou dans une chapelle. La forme est passée de l’ostentatoire au minimalisme, évolution anecdotique si elle n’était liée au message à transmettre.
Les réalisations oscillent entre deux impératifs : la grandeur proclamée de la Présence divine, que rien de trop beau ne peut contenir ; et l’humilité, voulue par le Christ, de cette présence, qui ne veut s’imposer à aucune liberté. Comment en manifester la vérité ? Éviter les paroles, refuser l’image s’abandonner au silence adorateur, alors que nous avons la charge de l’annoncer ? Face à l’indifférence et à l’incroyance, on ne peut se taire, mais la parole doit être vraie, et la forme suggérer le mystère proposé.
L’aménagement d’un lieu de la Présence eucharistique mérite une réflexion pastorale et une grande attention artistique. Dans les édifices étroits, la place dans l’axe du bâtiment, dans l’abside, sur un côté, montre au visiteur que le lieu est habité par la célébration du Repas. Ailleurs, une chapelle aménagée aidera au recueillement. La topographie, l’architecture, l’importance de la fréquentation sont à étudier avant que l’artiste imagine le meuble idéal. De même, l’environnement immédiat est à soigner, car le tabernacle n’est pas un placard. Il annonce, signifie, rassemble. C’est un signal qui appelle la ferveur comme le désarroi, qui convie des humains en leurs diversités et en leurs si différentes attentes.
Le pain que Dieu donne et qui donne Dieu
Le tabernacle n’est ni accessoire, ni fin en soi, mais s’ordonne avec l’autel et l’ambon. Le même Verbe se révèle dans les Écritures et se donne dans le Pain de l’autel, conservé dans le tabernacle. La Présence divine n’est pas voulue pour l’adoration, mais pour signifier que le corps glorieux du Ressuscité est nourriture pour les hommes.
Le pain qui fait l’Église
Par son incarnation, Dieu est universellement solidaire de tous les hommes. Son Corps ! C’est, avec lui, tous ses frères, « le Christ total » dont parle admirablement saint Augustin. Par le Pain du repas eucharistique, nous sommes tous membres du corps du Christ. Et toute prière en sa présence, se fait prière d’Église. Nul signe au monde ne peut transmettre un tel message : nous sommes Celui que nous recevons.
Le pain des hommes devient « le pain de Dieu »
Le travail de l’homme a fait le pain qui, sur la parole de Dieu, est devenu son Corps. Ce lieu me dit que je n’ai pas à quitter le monde pour trouver Dieu, mais que l’homme – Dieu m’accompagne en tout ce que je fais. Du pain, issu de la glèbe, du labeur pénible, de cette volonté de faire vivre humainement un être de chair et de sang, Dieu fait une nourriture d’immortalité.
Le pain de tous les jours
Ce pain est là pour tous les jours de la vie. Venu de la table des hommes, il est saisi par sa Parole pour être son Corps à la table de Dieu. En pleine vie humaine, il donne à tout ce qui relève de l’homme, selon la justice et la droiture, capacité divine. Ce tabernacle me dit la paternelle puissance de l’amour de Dieu, sans hausser le ton, en harmonie avec le signe qu’il contient, mystère de gloire et d’humilité.
Article extrait de la revue Célébrer n°292
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G. Bonnet – Le tabernacle : lieu de la présence eucharistique