Qu’est-ce que la crémation ?
Dans la société occidentale – et pas seulement en France – la crémation est une pratique funéraire encore minoritaire qui connait une augmentation forte et régulière. De 0,5 % des obsèques en 1975, elle était de 25 % en 2006 pour atteindre plus de 30 % en 2015. Elle pourrait représenter, selon les estimations, la moitié des obsèques (49 %) en 2030.
La crémation n’est pas un rite funéraire. Elle est un moyen technique de faire disparaître le corps et elle remplit la même fonction pratique que la mise en terre, l’inhumation. Les raisons qui font que nos contemporains préfèrent la crémation plutôt que l’inhumation sont variables : solitude, crainte qu’une tombe ne soit pas entretenue, désir de ne pas encombrer les proches, volonté de détruire un corps abîmé par la maladie, préoccupations écologiques ou moindre coût financier, portée symbolique du feu qui purifie opposé au pourrissement de la chair, … Ces représentations plus ou moins conscientes ou justifiées se conjuguent pour bousculer des pratiques anciennes au risque non maîtrisé de ne pas laisser de lieux de mémoire pour les proches quand le défunt choisit la dispersion des cendres.
La société civile a récemment légiféré a minima pour accorder aux cendres une destination digne, considérant malgré la destruction du corps – même l’ADN est détruit ! – qu’elles demeurent les restes d’une personne humaine et qu’à ce titre nous leur devions du respect. Sont désormais interdits par la loi du 19 décembre 2008 la conservation des cendres dans un lieu privé, la division des cendres dans plusieurs urnes, leur dispersion sur des voies publiques. Les communes doivent aménager des espaces où peuvent être déposées l’urne ou les cendres (colombarium, jardin du souvenir). La dispersion en mer n’est pas interdite, mais la loi prévoit qu’elle soit déclarée au lieu de naissance du défunt pour inscription sur le registre de l’état civil.
Contrairement à d’autres religions, l’Eglise catholique n’interdit pas la crémation. Un décret, daté du 8 mai 1963, a supprimé l’interdiction d’obsèques religieuses pour des personnes qui ont choisi la crémation. Le code de droit canonique de 1983 précise la position de l’Eglise :
Can. 1176 § 3. L’Église recommande vivement que soit conservée la pieuse coutume d’ensevelir les corps des défunts; cependant elle n’interdit pas l’incinération, à moins que celle-ci n’ait été choisie pour des raisons contraires à la doctrine chrétienne.
Le « oui » de l’Eglise est, en quelque sorte un « oui mais… » pour deux raisons : d’une part elle préfère l’inhumation pour tenir, jusque dans la mort, la commune identité du baptisé avec Jésus dont le corps a été mis au tombeau le vendredi saint. D’autre part, il est demandé que la célébration des obsèques précède la crémation pour conserver l’ordre des « stations ». La célébration à l’Eglise et les rites prévus par le rituel se déploient autour du corps et non devant l’urne funéraire. La crémation se déroule normalement après les obsèques à l’Eglise.
Cependant, il peut arriver qu’avec l’accord de l’évêque et uniquement dans des circonstances particulières on accepte d’organiser un temps de prière après la crémation. Plus fréquemment, lorsque le choix des familles et les conditions matérielles l’imposent, certains diocèses de l’Eglise de France préfèrent déléguer une personne qui officie au sein même du crématorium : célébrer dans ce lieu devant un corps semble préférable à l’accueil de l’urne dans l’église après la crémation.