Célébrer le mariage : s’ouvrir à la prière

mariés de dos devant l'autelPar Serge KerrienDiacre du diocèse de Saint Brieuc-Tréguier

La liturgie du mariage s’appuie sur un certain nombre de textes de prière : oraison d’ouverture, bénédiction des alliances, bénédiction nuptiale, prière des époux, prière universelle, prières propres à la célébration eucharistique. Voilà, sans aucun doute, une occasion offerte aux futurs époux de découvrir ou d’approfondir la prière chrétienne dans toutes ses facettes. Peu d’entre eux ont régulièrement participé aux célébrations depuis leur adolescence et le contexte propre aux mariages rend souvent difficile une atmosphère de recueillement. Leur faire découvrir les textes des prières enrichira leur perception du mariage ; cela leur permettra, et c’est essentiel, de retrouver la posture de la prière.

Les prières d’ouverture

Le rite d’ouverture se termine par une oraison. Le but de ce rite est de conduire à la prière, dans un dialogue confiant avec un Dieu qui se fait proche de l’homme et lui permet de s’adresser à Lui. Que peut-on faire découvrir dans les prières d’ouverture ? Tout d’abord, qu’elles s’adressent à Dieu qualifié de Seigneur, Tout-puissant, Père, vocabulaire peu commun aux futurs époux et qui mérite quelques éclairages. Les précisions sur le vocabulaire permettront de réaliser que les trois qualificatifs cités ne sont pas aussi antagonistes qu’il y paraît à première vue. C’est un visage de Dieu qui se dessine, le visage d’un Dieu aimant.

Ensuite, les oraisons, profondément ancrées dans l’engagement qui va être pris, déroulent un certain nombre de thèmes propres au mariage : l’union du Christ et de l’Église (oraison n° 1), le témoignage de foi (n° 4), la fécondité (n° 6), la proximité du Christ, compagnon de route (n° 7), l’amour et la communion conjugale (n° 6), autant de thèmes familiers, déclinés dans l’ensemble du rituel. D’autres prières présentent une forme et un contenu plus nouveaux permettant de dévoiler certains aspects du mariage généralement peu présents lors des rencontres de préparation : la consécration de l’amour mutuel (n° 8), la présence amicale et affectueuse d’une assemblée (n° 9), l’importance de la parole de Dieu (n° 9).

Une dimension christologique

La lecture des oraisons (nos 7 et 8 particulièrement) ouvre à une dimension christologique, rarement abordée dans la préparation au mariage, parce que jugée trop abstraite : l’union du Christ et de l’Église. Cet aspect est présenté de manière simple : par le don de sa vie, le Christ donne l’exemple de l’amour de Dieu, d’un amour total pour l’humanité. Ainsi, pour les conjoints, il est un exemple. S’aimer, c’est se donner totalement l’un à l’autre et trouver dans le Christ la source et le modèle de tout amour.

Une plus grande place pour Dieu

Dans les oraisons du nouveau rituel, la place et le rôle de Dieu sont mis en valeur de manière plus nette. De ce fait, l’attitude des époux y apparaît plus passive mais sans doute plus juste ; ils sont moins les acteurs, les ministres du sacrement et bien plus les récepteurs ouverts au don que Dieu leur fait. Si l’on compare les oraisons issues de l’ancien rituel (n° 4) et celles plus récemment écrites (nos 8 et 9), on ne peut que constater le changement de perspective. Le verbe actif est remplacé par un verbe passif. Cela ne veut pas dire que les époux deviennent les spectateurs du sacrement. Ils ont une place nettement affirmée dans l’échange des consentements, mais c’est Dieu qui consacre leur union.

La découverte des oraisons fait prendre conscience aux futurs époux de la place de Dieu dans leur cheminement et dans la célébration du sacrement. C’est aussi l’occasion de les aider à découvrir le sacrement comme don gratuit que Dieu leur fait, que cette gratuité requiert deux attitudes : se préparer intérieurement à recevoir le don et se soucier de la fructification du don reçu. L’attitude du Christ donnant sa vie jusqu’à la mort et celle de Dieu donnant gratuitement sa force d’amour sont des points d’appui forts d’une pédagogie d’initiation où Dieu, par les mots de la prière de l’Église, apprend ce qu’est aimer.

La posture de la prière

Il est sans doute intéressant de faire découvrir ce que les oraisons apprennent du mariage, de Dieu, du Christ. L’essentiel n’est cependant pas là. De ces mots de l’Église, il s’agit de faire une prière au cours de la célébration. Encore faut-il pouvoir entrer dans la posture de la prière. La foi chrétienne nous apprend que Dieu nous parle et nous écoute. Dès lors, prier c’est reconnaître une présence que l’on reçoit et à qui on s’adresse : un Dieu Père, Fils et Esprit. Prier, c’est aussi placer toute notre vie devant Dieu pour qu’il la saisisse et en fasse une action de grâce. Prier, c’est trouver en Dieu force et lumière pour la vie de tous les jours et le témoignage au monde. Dans toute célébration sacramentelle, la prière utilise les mots que donne l’Église. Il s’agit pour chacun de s’en emparer, de se laisser porter par eux et de les remplir de ce qui jaillit du cœur. Dans la célébration du mariage, la prière manifeste davantage l’union au Christ priant son Père et figure d’une relation d’amour dans laquelle s’inscrit l’amour humain.

Dans la préparation, il convient de prendre le temps de prier, de se mettre en silence devant Dieu, de se laisser porter par la prière de l’Église, de se réapproprier l’attitude intérieure et les mots que le Christ nous a laissés.

Tel est l’enjeu fondamental de la découverte et de l’appropriation des oraisons pour que toute la liturgie soit prière.

 

Article extrait de la revue Célébrer n°377

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