Les gestes des funérailles
Le geste parle. Surtout quand la douleur rend muet. Le rituel des funérailles propose de nouveaux gestes, très éloquents, et il n’est pas sûr qu’ils aient été intégrés dans la pratique générale. Si le chant et la musique ne sont pas toujours possibles, on a toujours les moyens de poser ces gestes symboliques. Louis Groslambert nous en rappelle le sens et attire notre attention sur la manière de les bien accomplir pour qu’ils soient prédication pascale.
« Le rite des funérailles devra exprimer de façon plus manifeste, le caractère pascal de la mort chrétienne ». Ainsi s’exprime la constitution conciliaire sur la liturgie au n° 81.
Le caractère pascal de la mort
La profession de foi de l’Église, c’est ceci : Christ est le passage (= Pâque) d’une existence sans but à une existence de vocation, des ténèbres à la lumière, de la vie mortelle à la gloire de la résurrection.
En perspective de la mort, le baptême avait été le lieu d’une prophétie : « Si nous sommes en communion avec le Christ par une mort qui ressemble à la sienne, nous le serons encore par une résurrection qui ressemblera à la sienne. » (Rm 6). Il n’est pas surprenant qu’à l’occasion des funérailles, l’Église reprenne les grands signes du baptême.
Les mettre en œuvre n’est pas facultatif et ne vise pas à solenniser les funérailles, mais à leur donner le caractère pascal.
- Le rassemblement : Le préalable du baptême avait consisté à réunir une (petite) assemblée, parce que « Dieu n’a pas voulu que les hommes reçoivent la sanctification séparément. » (Lumen Gentium 9). Lors des funérailles, les parents, les amis, les voisins sont là. Dans le cas d’obsèques dans l’intimité on peut craindre que l’expression de la solidarité dans le salut ne soit amputée. Dans la célébration, il ne s’agit pas seulement du passage du défunt par la mort, mais aussi du passage des vivants dans le deuil ; le passage du défunt invite les vivants à un voyage psychologique, affectif et religieux.
Il est hautement souhaitable que des paroissiens – même s’ils n’ont pas de lien avec le défunt, soient là. Leur présence et leur proximité aident la famille endeuillée. Leur chant et l’expression de leur foi sont un signe de la permanence de l’espérance dans les circonstances douloureuses.
- Les fleurs expriment ce que les mots ne savent pas dire (cela ne justifie pas des dépenses inconsidérées !).
- La croix : Le premier geste du baptême avait consisté à faire sur l’enfant le signe de la croix. C’est pourquoi la croix est là, aux funérailles. Mais elle est spontanément associée à l’idée de souffrance (comme dans l’expression « il faut porter sa croix »). Si, en tête du cortège, un parent porte la croix, si on la fixe à proximité du cercueil, elle n’aura pas, par elle-même, le sens pascal de l’espérance. C’est pourquoi, il faut associer au geste la parole : « le Seigneur nous a aimés jusqu’à mourir pour nous ; cette croix nous le rappelle : qu’elle soit le signe de son amour. »
Si la croix est portée en tête du cortège d’entrée, il apparaît que le Christ conduit la marche des hommes « Si je traverse les ravins de la mort… ton bâton me guide et me rassure. » (Ps 22).
La croix vissée sur le cercueil, seul le fournisseur l’a vue. Il serait utile qu’une phrase rende attentif à la profession de foi que cette croix vissée au cercueil suggère : le Christ s’est lié à nous jusqu’à la mort, afin de nous lier à lui jusqu’à la vie.
- Le cierge : Un autre geste du baptême avait consisté à remettre un cierge allumé au cierge de Pâques, « afin qu’illuminé par le Christ, le baptisé avance dans la vie en enfant de lumière, à la rencontre du Seigneur. »
Par la mort (mais l’existence a comporté beaucoup d’événements semblables), la personne s’est avancée vers le Christ.
Le rituel suggère qu’on allume au cierge de Pâques d’autres cierges qu’on place près du cercueil. De nouveau, une parole sobre suggère le sens : « que cette flamme éclaire ce que nous avons à faire pour repartir dans l’espérance. »
Ce geste est proposé à l’entrée. Mais il n’est pas exclu qu’il soit fait au moment où est chanté le psaume 26 « Ma lumière et mon salut », ou avant, ou après l’Évangile. Dans certaines paroisses, au moment de l’adieu où l’espérance a besoin de s’alimenter à un geste, des proches reçoivent un cierge allumé au cierge pascal et s’entendent rappeler qu’ils ont reçu la lumière de la foi par le défunt et qu’ils ont à porter le deuil dans l’espérance.
- Le livre de la Parole : II avait été ouvert lors du baptême ; la lecture de la parole de vie s’impose aussi lors des funérailles. Mais beaucoup de paroisses ont un lectionnaire des défunts très fragile, mal cartonné. Peut-on suggérer qu’on cherche la référence des textes dans le gros lectionnaire du dimanche et qu’on les lise ainsi dans un livre dont la taille et la tenue suggère qu’on entend une parole digne de foi ? A moins qu’on ne dispose d’un lectionnaire très digne.
- L’eau : Elle avait coulé au baptême. Lors des funérailles, au moment de l’adieu, le prêtre et l’assemblée en aspergent le cercueil, comme si la mort était une nouvelle naissance, comme si les funérailles étaient un nouveau baptême, un nouveau passage de la Mer Rouge, un abandon du pays de l’esclavage et un accès au pays de la liberté. (…)
Que proposer aux non-croyants en remplacement de ce geste ? Il convient qu’ils puissent dire leur attachement au défunt. « Vous pourrez, si vous le souhaitez, vous incliner devant le cercueil ou le toucher de la main… ou… »
Dans le rituel juif, l’encens est le symbole de la prière qui monte vers Dieu (Psaume 141/2). L’Apocalypse (Chapitre 8, 3) dit que les prières des saints montent vers Dieu comme l’encens.
Il en découle qu’on doit voir monter la fumée de l’encens : un encensoir qui ne fume pas doit rester au placard !
C’est au moment de l’adieu qu’on utilise l’encens. A ce moment, la prière consiste à professer que ce corps était le Temple de l’Esprit. On honore le défunt, non pour ses qualités humaines, mais à cause de tout ce qu’il avait reçu de Dieu. « En signe de respect pour toi – qui as été plongé dans la mort de Jésus, qui as été nourri par le corps de Jésus… (cf. S 69) — voici cet encens, qu’il monte vers Dieu avec notre prière. »
Louis Groslambert – Extrait de « Eglise qui chante » N°240
Au lieu de la sépulture
L’inhumation au cimetière constitue la troisième station de la liturgie des funérailles. Elle marque, pour le défunt, la fin de son chemin sur la terre. Le lieu de la sépulture devient un lieu de mémoire où certains aimeront venir honorer leur défunt et prier pour lui dans l’attente de la résurrection. Pour les proches, un ultime adieu accompli dans l’espérance du Royaume sera aussi l’occasion de franchir une nouvelle étape et de retourner à leurs occupations quotidiennes avec une foi renouvelée.
S’il s’agit d’une crémation, l’urne funéraire est déposée en un lieu adéquat, colombarium ou pleine terre. […]
On pourra prendre les prières prévues pour ces circonstances.
La station au cimetière, en l’absence de la personne qui a dirigé la célébration à l’église, est conduite par une autre personne de la communauté députée à cet effet ou, le cas échéant, par un proche de la famille.