Célébrer la liturgie de la Parole le dimanche en famille : pourquoi ? Comment ?
24 mars 2020
Devant l’impossibilité de se réunir en communauté paroissiale, beaucoup de familles se demandent comment vivre le dimanche de manière qu’il reste le « jour du Seigneur ».
La messe à la télévision ou par vidéo est une possibilité. Mais elle présente l’inconvénient de laisser chacun passif devant l’écran. La tradition de l’Église dispose d’autres ressources, telle la célébration de la liturgie de la Parole, que les difficultés actuelles peuvent nous faire redécouvrir pour célébrer activement en famille.
Pourquoi célébrer en famille ?
On peut donner au moins trois raisons de célébrer en famille :
1) La première raison, c’est que le baptême fait de chaque chrétien un adorateur du Père.
Lorsque des petits enfants viennent d’être baptisés, au moment de recevoir l’onction avec le chrême, celui qui l’a baptisé lui dit : « N., maintenant tu es baptisé. (…) Désormais, tu es membre du Corps du Christ, et tu participes à sa dignité de prêtre, de prophète et de roi ».
Comment comprendre que tout baptisé est prêtre, prophète et roi ? Parce qu’il est consacré au service de Dieu, et que ce service, il l’accomplit :
- dans la prière et la participation à la liturgie (c’est ainsi qu’il est prêtre),
- dans l’annonce, par toute sa vie, de la résurrection du Christ (c’est ainsi qu’il est prophète),
- dans le combat contre l’ennemi, c’est-à-dire le mal, sous toutes ses formes, en lui et autour de lui (c’est ainsi qu’il est roi).
C’est ce que l’on appelle le sacerdoce commun des baptisés.
Or la prière et la liturgie, ce n’est pas seulement dans une église : tout baptisé, parce qu’il est « sanctuaire de Dieu »1, peut prier et méditer la Parole de Dieu, partout où il se trouve.
2) On peut se rappeler aussi qu’une communauté familiale est une « Église domestique », selon l’expression du concile Vatican II. Elle est donc une petite Église qui cherche à vivre à son échelle ce que l’Église vit à la sienne : rendre grâces à Dieu, prier ensemble, écouter le Christ dans sa Parole et la mettre en pratique, prendre soin les uns des autres, chercher ensemble comment vivre en étant plus fidèles à l’Évangile du Christ… Les temps de célébration sont des temps privilégiés pour que la vie chrétienne s’inscrive en nous.
3) Enfin Jésus lui-même nous le recommande : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux »2. Chaque famille qui pratique la prière en famille peut donc expérimenter la présence discrète mais réelle de Dieu.
Pourquoi célébrer en famille… la Parole de Dieu ?
Dans la vie chrétienne, la Parole de Dieu occupe une place très importante ; c’est pourquoi l’Église en propose chaque jour la lecture de plusieurs passages, à l’intérieur de la messe ou de la prière des Heures. C’est pourquoi aussi la tradition monastique a fait de la lecture et de la méditation de l’Écriture (la Lectio divina) une part essentielle de l’activité du moine.
Le concile Vatican II a insisté sur le fait qu’écouter la Parole de Dieu, c’était écouter le Christ lui-même : « Il est là présent dans sa parole, puisque lui-même parle pendant que sont lues dans l’Église les saintes Écritures ».
Parler de « présence » du Christ dans la Parole que nous écoutons, fait de la Parole de Dieu un sacrement, c’est-à-dire un signe perceptible de la présence du Christ [3]. Et sa présence appelle notre réponse, par le chant, la prière et l’offrande de nous-mêmes.
Pourquoi s’appliquer à célébrer… le dimanche ?
Le dimanche a toujours été le jour de rassemblement des chrétiens, car c’est le jour de la résurrection du Christ, autrement dit du « mystère pascal ». Les chrétiens se rassemblent parce que le Christ est ressuscité, et qu’il est venu retrouver ses disciples en ce premier jour de la semaine. Là est le motif d’action de grâce par excellence : les chrétiens font mémoire de la résurrection du Christ présent au milieu d’eux, rendent grâce au Père, partagent le pain de la Parole et celui de l’Eucharistie que le Christ leur donne.
Le dimanche, c’est la Pâques de la semaine. Ou pour le dire autrement : le dimanche est à la semaine ce que Pâque est à l’année liturgique : son centre et son sommet.
Le dimanche à la messe, la liturgie de la Parole est plus développée (3 lectures, au lieu de 2 en semaine), de manière à nourrir plus largement la foi.
Alors comment préparer et vivre cette célébration ?
Comment organiser le temps de prière ?
- On peut apprendre le psaume un peu avant.
- On désignera un « conducteur » de la prière, qui ne sera pas nécessairement toujours le même Il ouvre et clôt la célébration, dit les textes de prière au nom de tous, le cas échéant bénit. Tout baptisé peut le faire.
- On désignera le ou les lecteurs.
Où trouver les textes ?
Ceux qui disposent d’une revue avec les textes du dimanche peuvent l’utiliser ou les télécharger sur le site de l’AELF.
Pour célébrer en famille, on veillera :
- à s’installer dans le coin-prière, ou à en installer un où chacun ait sa place, avec une bougie, une icône…
- à commencer avec une hymne de carême ; on pourra se référer aux propositions du SNPLS : Quels chants choisir pour le Carême ?.
- on peut prendre aussi la prière d’ouverture de la messe du jour
- à lire lentement les textes, à expliquer les mots difficiles
- si on le peut, à chanter le psaume ou à le lire
- pour l’Évangile, on peut, selon l’âge des enfants :
* Faire d’abord reformuler aux enfants ce qu’ils ont compris de l’Évangile, en complétant ce qu’ils ont omis, en expliquant ce qui est compliqué.
* Partager ce que l’on retient de l’Évangile ou des textes du jour ;
* On peut faire dessiner la scène ou un personnage aux enfants ;
* Avec des plus grands, proposer un partage d’évangile, ou pratiquer une Lectio divina : Trois conseils pour une Lectio divina (La Croix) ou, si on est assez nombreux, Lectio divina, la lecture sainte dans un groupe.
* Proposer un geste de vénération de la Parole (inclination), si on dispose d’une belle Bible.
- Un temps de prière d’action de grâce et d’intercessions, où chacun peut s’exprimer librement, suivi de la prière en commun du Notre Père, peut clore ce temps de célébration.
- Un temps autour d’une collation pourra prolonger sous forme conviviale ce temps de prière familiale.
Bonne célébration !
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3. Le pape Benoît XVI en a donné un enseignement approfondi en Dei verbum n. 56 :
Le Mystère de l’Incarnation est vraiment à l’origine de la sacramentalité de la Parole de Dieu : « Le Verbe s’est fait chair » (Jn 1,14), la réalité du mystère révélé nous est offerte dans la « chair » du Fils. La Parole de Dieu se rend perceptible à la foi par le « signe » des paroles et des gestes humains. La foi, donc, reconnaît le Verbe de Dieu, en accueillant les gestes et les paroles par lesquels il se présente à nous (…).
La sacramentalité de la Parole se comprend alors par analogie à la présence réelle du Christ sous les espèces du pain et du vin consacrés. En nous approchant de l’autel et en prenant part au banquet eucharistique, nous communions réellement au Corps et au Sang du Christ. La proclamation de la Parole de Dieu dans la célébration implique la reconnaissance que le Christ lui-même est présent et s’adresse à nous pour être écouté (…). Le Christ, réellement présent dans les espèces du pain et du vin, est présent analogiquement dans la Parole proclamée dans la liturgie ».