Célébrer le mariage : accueil et rites d’ouverture
Par Serge Kerrien, Diacre du diocèse de Saint Brieuc-Tréguier
Toute célébration liturgique commence par l’accueil, dont on ne mesure pas toujours l’importance. Ce temps donnera tout son sens à la demande sacramentelle, si les deux sont mis en écho, dans la célébration du mariage. C’est le moment où se joue souvent la qualité de la prière et l’attitude d’une assemblée trop rarement partie-prenante.
Accueillir en vue de convertir
Pour que l’accueil liturgique trouve justesse et force, il se prépare dès la première rencontre avec les futurs époux. Non pas dans la découverte immédiate du rituel mais dans l’accueil de ce qu’ils sont, de leur vie, de leurs valeurs. Sur le chemin sacramentel, il convient de respecter les étapes et d’abord, à l’exemple du Christ, d’accueillir l’humain, tout l’humain :
« Rejeter d’un revers de main ces valeurs [celles que portent les futurs époux] sous prétexte qu’elles n’ont rien de spécifiquement chrétien, qu’elles relèvent aujourd’hui de valeurs communes largement partagées, ou qu’elles sont ambiguës, c’est fermer le chemin de l’annonce de l’Évangile. Il convient donc de les accueillir, ces valeurs, et de prendre appui sur elles [1]. »
C’est d’ailleurs sur l’accueil de l’humain que s’appuie le temps de l’accueil proposé par le Rituel. Cependant, entre la première rencontre des futurs époux et l’accueil liturgique, un chemin a été nécessaire. Quel est ce chemin possible ? La découverte du Rituel et son appropriation peuvent nous l’apprendre.
Les rites d’ouverture de la célébration
« Le prêtre (…) se rend à la porte de l’église, accueille les futurs époux et leur souhaite la bienvenue pour montrer que l’Église prend part à leur joie[2].
Ensuite, on se rend à l’autel en procession (…) [3]. »
Cette simple démarche proposée par le Rituel fait comprendre le chemin à accomplir dans la préparation pour que la célébration trouve tout son sens. Le but du chemin d’humanité est la rencontre du Christ que l’autel symbolise. D’emblée, la liturgie centre les époux et l’assemblée sur Celui qui vient partager leur joie et sanctifier leur union. Aider les futurs époux à saisir ce premier signe leur fait découvrir qu’une célébration sacramentelle n’est pas qu’un ensemble de rites mais bien un chemin de rencontre avec le Christ et, par lui, avec Dieu.
La lecture des formes de salutation sera l’occasion de saisir le sens du signe de la croix et, par là, que le Dieu de Jésus Christ est un Dieu Père, Fils et Esprit, qu’il offre à chacun grâce et bonheur, que le mariage trouve son sens dans une alliance plus grande : celle du Christ et de l’Église. Sans doute tous les couples ne découvriront-ils pas d’emblée ces richesses théologiques ; les aider à se réapproprier le signe de la croix comme signe baptismal leur fera prendre conscience du rapport entre le baptême et le mariage. Dès lors, un chemin avec le Christ est ouvert, chemin que précisent les monitions d’ouverture[4]. Ce chemin se fait avec les autres et en Église ; il favorise l’écoute de la parole de Dieu, prend Dieu à témoin et lui demande de combler les futurs époux de l’Esprit. La vérité des mots prononcés suppose que la grâce demandée puisse être accueillie, reçue par des cœurs ouverts à la proposition que Dieu fait. L’examen un peu attentif de ces monitions fait découvrir que l’Église ne demande pas d’emblée une foi pleine et entière ; elle pose la question de l’ouverture du cœur à la réception de la grâce. Si les cœurs sont ouverts et sincères, le chemin est possible qui fera découvrir le Christ et pourra proposer la foi.
On le voit bien, le support du Rituel se révèle d’une extrême richesse. Découvrir comment le Christ et l’Église accueillent amènera à échanger sur la façon dont l’accueil de l’autre et des autres se vit, au quotidien, dans le couple.
Et la prière ?
Beaucoup de couples ne savent pas ou ne savent plus prier. La préparation au mariage peut être l’occasion de réapprendre à prier. La découverte du sens du signe de la croix ouvre à la prière. Ainsi, on n’hésitera pas, à la fin de la rencontre consacrée à l’accueil, à proposer un temps de prière dont le signe de la croix sera le geste central. Ainsi le rituel permet d’apprendre, de rencontre en rencontre, les grandes postures de la prière. Et le jour de la célébration, les époux, non seulement seront à l’aise dans les gestes, mais sauront se tenir devant Dieu, prononcer les mots de la prière et avoir le cœur ouvert à la grâce de la rencontre d’un Dieu qui accueille.
Personnaliser la célébration
Accueillir les futurs époux, considérer leur expérience humaine, posent au célébrant la question de la personnalisation de la célébration. Sans tomber dans les travers des feuilletons américains ou ceux d’un ritualisme fermé, il sera possible de donner à chaque célébration une touche personnelle qui éviterait une liturgie impersonnelle ou, à l’inverse, une personnalisation telle que le Christ ne serait plus l’acteur principal de la liturgie.
Le rituel offre des choix dans les oraisons, les lectures, les échanges de consentement, les bénédictions nuptiales et finales. Il est judicieux que les époux participent au choix de ces éléments de la liturgie. De même du choix des chants, à condition qu’ils soient guidés et conseillés.
On sait aussi que la musique tient une grande place dans la vie des époux. Là encore, une personnalisation est possible à certaines conditions ; nous aurons l’occasion d’y revenir.
D’autres moments supposent un aspect plus personnel qui ne déstructure pas les rites et conserve l’esprit de la liturgie : la monition d’accueil, l’homélie, la prière des époux, la prière universelle. Bien préparés, ils donneront à la célébration un caractère personnel tout en centrant l’action liturgique sur le Christ.
Accepter de personnaliser à outrance pour faire plaisir trahirait à coup sûr l’esprit de la liturgie, l’intention de l’Église et, probablement même, le désir profond des époux.
Comme toujours en liturgie, tout est question d’intelligence et d’équilibre.
Article extrait de Célébrer n° 376
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