En dehors de la messe, vivre la communion et la fraternité, comment ?

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On s’en souvient, le contexte épidémique a eu des conséquences sur les dispositifs pastoraux qui concernent l’assemblée dominicale, la célébration de l’eucharistie et l’accès à la communion. Face à l’absence de rassemblements communautaires ou à cause de la limite imposée du nombre de participants, de nombreux  fidèles ont imaginé et vécu des temps de la prière « à la maison » ou en petits groupes dans leur église paroissiale ou autrement. Les suggestions qui suivent dans cet article écrit en novembre 2020 ne visaient pas seulement la période du confinement, mais la suite avec l’imposition probable de limites pour le nombre de participants. Elles valent toujours en grande partie aujourd’hui pour réfléchir certaines situations pastorales où un nombre conséquent de fidèles est empêché durablement de rejoindre de manière habituelle l’assemblée dominicale. Puisse le lecteur profiter de la lecture de cet article, témoin des « leçons » mises en avant par la crise, pour nourrir son discernement pastoral habituel. 

Quelles que soient les possibilités choisies, il faudra toujours veiller à ne pas créer une assemblée de fait dans l’église, pour rester dans le cadre d’un accueil individuel. À titre d’exemple, pour ceux qui choisiront de proposer la communion en dehors de la messe, il sera nécessaire que le temps prévu de méditation de la Parole soit vécu individuellement par chacun à l’aide d’un feuillet support, avant la rencontre avec le prêtre. Une certaine sobriété dans les initiatives doit manifester leur portée ecclésiale, l’attente du rassemblement effectif de la communauté et le souci de l’évangélisation comme du service des pauvres.

Voici quelques éléments de discernement qui seront à apprécier selon les situations et les orientations en vigueur dans les diocèses et leurs pratiques pastorales, afin d’évaluer la meilleure façon d’assurer le lien des fidèles à l’Eucharistie.

Ces propositions prennent appui, entre autres, sur le Rituel de l’eucharistie en dehors de la messe (REM), AELF 1996, 2e éd., sur le Livre des Bénédictions – Rituel Romain, AELF 1995, 2e éd., et le Directoire pour la piété populaire et la liturgie, 2001.

1 – Ouverture des églises et dévotions populaires

Parce que les églises restent ouvertes, les fidèles sont encouragés à y passer pour un bref temps de prière personnelle, dans le cadre de la sortie d’une heure pour motif de promenade. Si les prêtres sont encouragés à s’y tenir largement, pour offrir notamment accueil, écoute et possibilité de recevoir le sacrement de la pénitence et de la réconciliation, il faudra veiller à proposer des moyens (feuillet ou livret de prière individuel) afin de permettre une prière chrétienne enracinée dans la méditation des Écritures. Un certain nombre de dévotions populaires le permettront également comme la prière du chapelet et du rosaire.

Des parcours individuels pourront être proposés afin de permettre la contemplation d’une œuvre d’art sacré (tableau, sculpture, fresque, vitrail…) en lien avec un passage de l’Écriture sainte.

2 – Le culte eucharistique en dehors de la messe

S’il peut être envisagé de célébrer la messe au domicile des familles, plusieurs points de vigilance demandent à être considérés : une prudence théologique concernant la privatisation des messes, le souci d’équité entre les fidèles et l’affaiblissement de la dimension ecclésiale de sa célébration[1] ; une vigilance sanitaire, afin que le ministre, allant de maison en maison, ne soit pas un facteur aggravant ou accélérateur de la circulation du virus ; un rappel canonique qu’un prêtre ne peut célébrer la messe qu’une fois par jour à moins que son ordinaire ne lève la limite, ainsi qu’une célébration dans un lieu digne[2]. Plusieurs propositions peuvent répondre à la demande eucharistique des fidèles, sans se focaliser sur une seule pratique au détriment des autres.

Durant le temps de l’épidémie, les ministres ordonnés et les ministres extraordinaires de la communion auront le souci de veiller aux personnes âgées comme aux malades et, tout particulièrement, aux personnes qui vont quitter cette vie. Ils pourront se reporter au Chapitre II du Rituel de l’eucharistie en dehors de la messe, « La communion et le viatique portés aux malades par un ministre extraordinaire », qui offre une aide précieuse pour exercer cette mission.

Si elle peut être proposée afin de maintenir un lien avec le sacrement de l’Eucharistie, les fidèles « doivent se rappeler que cette présence dérive du sacrifice et tend à la communion sacramentelle en même temps que spirituelle » (REM n. 80). Les notes pastorales, qui déploient les conditions et modalités d’exposition du Saint Sacrement, attirent l’attention sur la relation qui l’unit à la messe et qui peut se manifester de diverses manières : chants accompagnant l’exposition et la reposition, prières et lectures tirées de la Sainte Écriture, silence sacré. Il est également possible de prier une heure principale de la liturgie des heures.

Durant le confinement actuel, un rite bref (REM nn. 42ss) peut être employé puisque le nombre de communiants ne permet pas une célébration communautaire. En conséquence, il est possible de proposer aux fidèles ce rite préparatoire avant la distribution de la communion. On veillera préalablement à rendre possible la célébration de la Parole de Dieu à domicile (ou individuellement sur place) avec les textes liturgiques du dimanche et/ou la participation à une retransmission télévisuelle en direct de la messe paroissiale ou non.

La réception de la communion en dehors de la messe devra se faire à heures fixes et en présence d’un ministre dûment mandaté par l’autorité compétente. Elle ne doit pas se faire au détriment de la communion portée aux malades et aux mourants.

3 – Liturgies domestiques

Le temps du confinement a offert à beaucoup de fidèles de faire l’expérience de la prière personnelle ou familiale au travers de liturgies domestiques, véritables célébrations de la Parole de Dieu. On veillera à ce que ces célébrations manifestent toujours l’accueil de la Parole de Dieu, qui fait naître une authentique action de grâce et une véritable intercession en s’appuyant sur les textes du dimanche. Ainsi sera manifesté le lien eucharistique de toute célébration liturgique.

4 – Célébration de la Liturgie des Heures

Certains fidèles ont découvert également la joie et la beauté de la sanctification du temps, au travers de la célébration de la Liturgie des Heures. Comme le rappelle la Présentation Générale de la Liturgie des Heures n°12, elle constitue avec la célébration de l’Eucharistie, un diptyque de la prière chrétienne. On veillera donc à la proposer de manière renouvelée comme une source et un modèle de prière chrétienne.

[1] Cf. Sacrosanctum concilium 41 & 42.

[2] Cf. Code de droit canonique nn. 905 & 932.

SNPLS, 19/11/2020

 

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