Le Rituel du mariage, élaboration et innovations
Par Pierre Faure, Diacre jésuite, responsable du Centre spirituel de Penboc’h dans le diocèse de Vannes.
Pour ce nouveau Rituel, on peut dire que tout commence en 1991 avec la publication en latin à Rome de la deuxième édition du Rituel du mariage (Ordo celebrandi matrimonium. Editio typica altera) décidée par la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. Le précédent rituel, rénové selon les directives du concile Vatican II, avait été publié dans les mêmes conditions en 1969. Il avait été publié en français la même année car, à cette époque post conciliaire, les travaux d’élaboration du rituel français étaient menés en parallèle avec l’élaboration du rituel latin.
Une longue élaboration commune de l’Église
Dès 1991, la Commission francophone pour les traductions et la liturgie (CIFTL) qui réunit un évêque chargé de la liturgie pour chacun des pays francophones (France, Belgique francophone, Canada francophone, Suisse romande, Luxembourg, Afrique du nord), nomme une équipe de travail composée de personnes de ces différents pays, chargée de traduire et adapter le rituel latin du mariage qui vient d’être publié. Cette équipe comprend huit prêtres, un diacre religieux, un diacre marié, deux femmes mariées et un homme marié. Tous sont impliqués dans la liturgie, la théologie ou la pastorale du mariage, ou l’accueil et l’accompagnement des futurs époux. Ils ne peuvent se consacrer au chantier du rituel qu’en plus de leurs autres responsabilités. Cette équipe se réunit de 1992 à 1995 et élabore un projet de nouveau rituel, en lien permanent et sous la responsabilité des évêques de la CIFTL.
Le 1er février 1996 un projet est envoyé à chacun des évêques des pays membres de la CIFTL, pour étude et amendement. L’équipe de travail reçoit 911 amendements qu’un groupe d’experts sous la conduite des évêques de la CIFTL examine un par un. En juillet 1998 un rapport envoyé à chaque évêque indique pour chaque amendement s’il est retenu ou pas et pourquoi : 116 amendements ont été retenus et 795 ne l’ont pas été. En mai 1999 une deuxième version du Rituel est alors envoyée à chaque évêque qui doit voter par correspondance : oui (placet), non (non placet), oui avec réserves (placet juxta modum). Le rituel est approuvé à une très grande majorité. Il est alors envoyé à chaque Conférence des évêques des pays membres de la CIFTL qui doit voter collectivement. Toutes les Conférences des évêques concernées approuvent le rituel à une très forte majorité. Au début 2000 le Rituel ainsi approuvé est envoyé à Rome à la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements pour recognitio c’est à dire reconnaissance de ce rituel comme faisant partie du rite romain.
Mais en mai 2001 la même Congrégation publie de nouvelles règles pour l’élaboration des rituels dans les diverses aires linguistiques des diocèses de rite romain. Il s’agit de la cinquième instruction « Pour la correcte application de la Constitution sur la sainte liturgie – De l’usage des langues vernaculaires dans l’édition des livres de la liturgie romaine », connue sous son titre latin : Liturgiam authenticam. Les diverses mises au point devenues nécessaires pour appliquer ces nouvelles règles ont pris du temps, et la recognitio de la Congrégation n’est intervenue qu’en janvier 2005.
Quelles nouveautés ?
Deux livres
La première nouveauté c’est qu’il existe désormais un livre du rituel du mariage. Depuis plusieurs années en effet le Rituel précédent n’était plus réimprimé car il semblait que le nouveau Rituel allait être publié « bientôt ». Mais d’étape en étape le délai a finalement été de quatre ans !
La deuxième nouveauté est que ce Rituel paraît sous deux formes : une édition de célébration, reliée, grand format (21 x 28 cm), de belle couleur blanc gris, imprimée en noir et rouge sur papier de couleur crème, comme tous les livres liturgiques, et une édition de travail, brochée, de petit format (16 x 21,5 cm) et imprimée en noir et blanc. On peut donc souhaiter que les futurs couples achètent le Rituel petit format (pour la modique somme de 12 euros), de manière à préparer de près la célébration de leur mariage.
Sept points nouveaux dans le rite
Il se pourrait bien que ces nouveautés échappent à la plupart des personnes non spécialistes qui participeront à la célébration d’un mariage selon le nouveau rituel. C’est dire que ces nouveautés ne sont guère spectaculaires. En revanche pour les prêtres et les diacres qui présideront la célébration du sacrement de mariage, et aussi pour les laïcs qui accueillent et accompagnent la préparation de ce sacrement, le rituel présente des nouveautés importantes, et propose des choix nouveaux.
- Les cinq Bénédictions nuptiales du rituel latin comportent toutes une prière pour que l’Esprit Saint donne aux nouveaux époux sa force et sa grâce (n° 284-288). De plus, le prêtre ou le diacre qui prononce cette prière tient les mains étendues au-dessus des nouveaux époux, comme le fait le prêtre pour invoquer l’Esprit sur le pain et le vin au cours de la prière eucharistique, ou comme le fait l’évêque pour la prière du sacrement de confirmation. Ces deux innovations revalorisent évidemment la bénédiction nuptiale qui, avec l’échange des consentements, constitue désormais les deux piliers du sacrement de mariage.
Le rituel francophone propose en outre une sixième bénédiction nuptiale (n° 289) de structure trinitaire, avec un refrain chanté pour l’assemblée. On peut souhaiter que des cantillations de cette prière soient composées avec un beau refrain pour l’assemblée, ce qui fera de la bénédiction nuptiale un grand moment de la célébration
Le rituel laisse maintenant le choix de placer la bénédiction nuptiale juste après l‘échange des alliances (qui suit l’échange des consentements). Le cœur de la liturgie du sacrement peut s’en trouver renforcé : la bénédiction nuptiale et l’échange des consentements s’appuyant et se valorisant mutuellement.
- Le dialogue qui précède l’échange des consentements, dans ses deux formules au choix, est plus développé. Et surtout, nouveauté importante qu’il faudra commenter avec les futurs époux, il précise que « les époux s’engagent à éduquer leurs enfants selon l’Évangile du Christ et la foi de l’Église ». Enfin si les futurs époux le souhaitent, ils peuvent s’engager « à assumer ensemble leur mission de chrétiens dans le monde et dans l’Église » ce qui renvoie au n°17 de Familiaris consortio1.
- Le rituel français propose le choix entre trois formules pour l’échange des consentements au lieu de deux précédemment. La formule nouvelle, traduite du latin (n° 78) reprend sous forme affirmative le texte de la formule où le prêtre ou le diacre demande aux futurs époux leur consentement (n° 81).
- Le rituel français donne la possibilité, si cela convient, de dire la profession de foi pour manifester que le mariage est bien célébré dans la foi de l’Église (n° 69). Ce point devra faire l’objet d’échange avec les futurs époux surtout s’ils ne sont pas des pratiquants de la foi chrétienne.
- Pour la réception du consentement des époux, le prêtre ou le diacre peut étendre la main en direction des époux ou bien, nouveauté, poser la main droite sur les mains jointes des époux (n° 82).
- Lorsque le mariage est célébré au cours de la messe, il n’y a pas de préparation pénitentielle, mais on doit chanter l’hymne « Gloire à Dieu » (n° 54).
- À la fin de la célébration, il est possible que la communauté chrétienne offre aux nouveaux époux un souvenir de leur mariage (n° 132) comme une Bible, un crucifix, une icône, un chapelet. Il est aussi demandé que la signature des registres ne se fasse pas sur l’autel, pour respecter sa spécificité.
Quatre cas particuliers
Le nouveau Rituel propose aussi une célébration pour quatre cas particuliers :
- la bénédiction des fiancés (n 300-324) qui se trouvait déjà dans le Livre des Bénédictions.
- la bénédiction des époux au cours de la messe pour l’anniversaire de leur mariage (n° 325-339) qui se trouvait déjà dans le Missel romain.
- une prière pour deux catéchumènes ou une partie catéchumène et une partie non chrétienne après leur mariage civil (n° 340-348).
- une prière pour deux néophytes mariés, ou pour un néophyte et son conjoint chrétien, au jour du baptême, ou l’un des dimanches qui suit (n° 349-350).
C’est dire la richesse de ce nouveau rituel qui doit devenir l’instrument privilégié de tous ceux qui accueillent et accompagnent les demandeurs de mariage à l’église.
Article extrait de Célébrer, n°341, janvier 2006, p 21-24.
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1. Exhortation apostolique de Jean-Paul II, 22 novembre 1981.
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