Le Triduum Pascal #3 : le Samedi saint

Alors qu’à l’origine, l’Église célébrait l’ensemble du mystère pascal du Christ lors d’une unique célébration, la vigile pascale, le besoin s’est fait sentir de développer chacune des facettes de ce même mystère en autant de célébrations : repas pascal, passion et mort du Seigneur, silence du tombeau, résurrection. Cela a commencé à Jérusalem, où l’on pouvait pérégriner de lieu en lieu sur les traces du Sauveur : Cénacle, Jardin des Oliviers, Golgotha, etc. Ainsi naquit au IVe siècle le « triduum pascal », les trois jours, selon l’expression de saint Augustin, du « Christ crucifié, enseveli et ressuscité », triduum qui allait donc du jeudi soir au dimanche de Pâques.

#3 : Le Samedi saint – série d’articles proposée par le SNPLS à partir d’éléments fournis par Louis-Marie Chauvet

« Le Samedi saint, l’Église demeure auprès du tombeau de son Seigneur. Elle médite la passion et la mort du Christ, ainsi que sa descente au séjour des morts, en attendant sa résurrection dans le jeûne et la prière. » Ces quelques lignes sur une grande page blanche du Missel romain donne le sens du Samedi saint qui s’articule autour de trois axes : la méditation, le jeûne et la prière.

Quand s’achève la célébration de la Passion le Vendredi saint, l’assemblée se retire dans le silence. Le dépouillement de l’église, l’absence de nappe d’autel, de fleurs, de cierges, et plus encore l’ouverture du tabernacle vide nous aide à comprendre le pourquoi du silence : il est le reflet de l’absence. Même si nous ne sommes pas dans la sidération des disciples qui perdant leur maître et ont vu leurs espérances s’effondrées, dès la fin de l’office du vendredi saint, nous entrons dans la célébration du silence. Nous expérimentons l’absence de Dieu, ce qui nous permet de partager le lot d’une grande part de l’humanité qui ignore qu’elle est voulue et aimée d’un Dieu de tendresse et d’amour.

C’est pourquoi la méditation est au cœur de ce jour : « L’Église ouvre le livre et se souvient : l’amour nous aimé jusqu’à la fin ». Ces premiers mots d’une hymne orientent notre méditation. Il s’agit non seulement de méditer sur la Passion qui est comme la fine pointe de la vie donnée du Christ, mais également de regarder comment il s’est donné à chaque instant de sa vie. Le passage par la mort est inscrit dans la volonté du Christ de prendre chair de notre chair, les circonstances ne sont que le témoignage de la méchanceté des hommes incapables de reconnaître la beauté de l’amour qui aime jusqu’à la fin. En ces heures du Samedi saint, il est bon de prendre le temps de méditer sur l’amour de Dieu qui s’est abaissé jusqu’à descendre sur notre terre, et plus encore jusqu’à descendre au plus bas des enfers pour sauver l’humanité dans sa totalité.

L’autre versant du silence est le jeûne, certes de nourriture, mais aussi de toutes paroles inutiles, de toutes activités qui troublent la méditation. Jeûner, c’est accepter d’être faible, c’est se mettre en situation de dépendance, c’est surtout se mettre en capacité de recevoir et donc d’attendre en silence d’être comblé. Car le jeûne demandé à chacun correspond au jeûne que toute l’Église vit en l’absence de célébration eucharistique. Le Samedi saint aucune messe n’est célébrée, nul ne communie au corps du Christ ressuscité, excepté ceux qui vont mourir auxquels on porte la communion en viatique. Il faut attendre. Attendre la nuit qui célèbre la joie surabondante du passage de la mort à la vie.

Dans l’attente, au cœur du silence et de la méditation jaillit la prière, prolongement de la grande prière du Vendredi saint, prolongement, surtout, de la prière du Christ qui a offert le monde à son Père.

Le silence du Samedi saint n’est pas un espace vide et inutile, il est nous allège de nous-mêmes pour découvrir en nous la présence de Celui qui nous nous conduit au Père par l’Esprit.