L’hymne du « Te Deum » : A toi, Dieu, notre louange !
Par Louis Groslambert, Prêtre, responsable de la PLS et de la musique liturgique du diocèse de Belfort-Montbéliard
Cette hymne A toi, Dieu, notre louange ! est placée par la liturgie des Heures en conclusion de l’Office des lectures des dimanches (sauf en Carême), des solennités et des fêtes. Cette composition de Nicetas, qui était évêque en Roumanie à la fin du IVe siècle, l’Église l’a transmise précieusement et en a fait le chant privilégié des actions de grâce.
Structure
Cette doxologie solennelle est apparentée à une Préface ; en effet, après l’adresse à Dieu le Père et l’énoncé de ses titres, elle fait entendre l’acclamation « Saint, saint, saint ». Elle affirme que le chant de l’Église de la terre rejoint le chant de l’Église du ciel, le chœur des apôtres, des prophètes et des martyrs. Après avoir nommé les trois personnes (« Père infiniment saint, Fils éternel et bien-aimé, Esprit de puissance et de paix ») viennent trois strophes destinées à louer le Christ incarné, victorieux de la mort et qui revient pour le jugement. On reconnaît dans ces lignes les trois affirmations de l’anamnèse.
Sources scripturaires
« A toi, Dieu… l’hymne de l’univers » rappelle les psaumes du règne cosmique, par exemple : « Le Seigneur est roi » (psaume 46, 3… 8 ; 94, 4 ; 144, 1). Dans « Saint, saint, saint », on reconnaît le chant des chérubins dans la vision d’Isaïe 6.
Les qualités du Christ reprennent des textes du Nouveau Testament. « Fils bien aimé » est le titre donné à Jésus lors du baptême (Mt 3, 17 ; Act 13, 33) et de la transfiguration (Mc 9, 7). « Le Fils du Dieu vivant » est la profession de foi de Pierre à Césarée (Mt 16, 16), celle des démons (Mt 8, 29), des pêcheurs après la tempête (Mt 14, 33) et du centurion au pied de la croix (Mt 27, 54).
« Tu n’as pas craint de prendre chair dans le corps d’une vierge » fait référence aux évangiles de l’enfance (Luc 1, 26-35, Mt 1,18) et à He 10, 5 ainsi que Gal 4, 4. L’expression « ta victoire sur la mort » fait venir à la mémoire les évangiles de Pâques et à l’exclamation ironique de Paul : « mort, où est ta victoire » (1 Co 15, 54).
En lisant « tu as ouvert les portes du royaume », on pense au larron (Lc 23, 43), et aux textes où Paul affirme « vous êtes ressuscités » (Col 2, 12 ; 1 Co 6, 11 ; Rm 5, 9 ; Rm 8, 30) ; « il nous a fait entrer dans le royaume de son fils bien aimé » (Col 1, 13). « Tu règnes à la droite du Père » reformule Mc 16, 19 et donc les récits d’Ascension. «Tu viendras pour le jugement » énonce Jn 5, 22 ou Jn 12, 48 ou Mt 25, 40.
On voit que la louange du Seigneur, telle que l’Église la conçoit, ne jaillit pas d’émotions sentimentales, mais du kérygme. Lorsqu’elle loue le Seigneur, l’Église fait mémoire des merveilles du salut.