Préparer les fiancés à la liturgie du mariage
Par Benoît Delabre, Curé de Martigues dans le diocèse d’Aix et Arles
Le contexte paroissial de mon ministère est pauvre humainement et chrétiennement. Les deux tiers des personnes demandant le mariage à l’Église sont non catéchisées, et parmi celles-ci un quart sont non baptisées. Pour beaucoup, le lien à Dieu existe tout en étant ténu, et passe par l’Église à l’occasion du mariage. La culture liturgique de ces personnes est réduite à la participation à tel mariage ou sépulture ou baptême.
A la première rencontre avec le couple, je demande ce que chacun attend de moi, puis leur dis que j’attends d’eux une ouverture au dialogue et une vérité autant dans le chemin vers leur mariage, que dans la célébration : que tout ce qu’ils feront ou diront soit vrai et cohérent avec ce qu’ils sont. Lorsqu’ils ont des demandes particulières, je leur demande le sens qu’ils y mettent et réfléchis avec eux sur l’opportunité de leur souhait, et le cas échéant, sur le moment adéquat et la mise en œuvre dans la célébration.
La préparation liturgique des fiancés
Le Texte national pour l’orientation de la catéchèse en France rappelle qu’« Il est urgent d’élaborer des cheminements qui font vivre aux personnes la dynamique spirituelle dont la célébration sacramentelle sera l’expression et l’accomplissement »1 et que « La liturgie est un lieu vivant de l’initiation. »2
Célébrations de la Parole et bénédictions
Nous avons donc introduit deux liturgies dans le cheminement.
Celui-ci commence par une après-midi sur le thème de la liberté et une invitation à reposer la décision du mariage. Quelques temps après, les futurs mariés vivent une courte célébration dans l’église avec des membres de l’équipe de préparation : un accueil, une parole de Dieu, un geste sur leurs mains unies, la prière. Première liturgie vers la célébration du mariage, qui leur fait réaliser plus que les mots, l’engagement qu’ils prendront ce jour là et la présence de Dieu sur leur chemin. Dès ce moment, ils sont appelés à prier le Notre-Père, ensemble si possible, chaque dimanche jusqu’au mariage.
Le deuxième moment liturgique vient après un parcours sur la fidélité, l’indissolubilité et la fécondité. C’est une bénédiction au cours d’une messe dominicale. Relue juste après avec eux, elle nous conduit à parler de l’alliance entre Dieu et les hommes et de leur propre alliance.
Résonances avec la vie du couple
Dans les rencontres personnelles avec eux, je prends tout ce qui, dans leur choix de la parole de Dieu, peut être lié à la liturgie et à leur propre vie. Le verbe « bénir », présent dans presque tous les psaumes de mariage, permet de parler de la bénédiction dans la vie quotidienne – dire du bien de l’autre -, de la bénédiction envers Dieu et de celle reçue de Dieu, de leur bénédiction nuptiale dans la liturgie. De même avec l’acte de quitter père et mère, avec le mot amour – à quels moments est-il présent dans la célébration ? – etc. Quant au dialogue initial et à l’échange des consentements, leur faire écrire la déclaration d’intention avec leurs propres mots et les rencontrer séparément les y prépare.
Familiariser avec la célébration
L’écriture d’un mot d’accueil les ouvre à un dialogue avec leurs familles et invités, la formulation d’une prière d’époux lorsque cela est cohérent les pose devant Dieu. La confection d’un livret de mariage pour leurs invités participe à l’appropriation de la célébration. Enfin, une visite du lieu de célébration – les différents éléments de l’église, la place de leurs sièges dans cet ensemble, la Vierge Marie à qui la plupart offre un bouquet … – les familiarise aussi avec la liturgie. La répétition de l’échange des consentements pour qu’il soit entendu, et de l’échange des alliances pour qu’il soit vu le plus possible, sont importants pour les rassurer et prendre en compte l’assemblée.
La célébration du mariage
L’écueil du spectacle
Ces dernières années, j’ai évolué quant à l’emplacement des fiancés. D’une place plus en vue, tout en étant orientée vers l’autel, je suis passé à une place proche de leurs familles et amis. Qu’ils sentent derrière eux cette présence, ce soutien, la prière de leurs invités, plutôt que mettre « en spectacle » des fiancés, non habitués à être dans une église et devant une assemblée plus disposée à assister qu’à participer. Dans ce sens, un mot d’accueil dit par les futurs mariés a aussi pour but de partager un élément ou l’autre de leur cheminement l’importance qu’est pour eux le mariage à l’église, et d’y intégrer les membres de l’assemblée venus là plutôt en spectateurs.
Savoir-être
La présence attentive, le chant et la prière de l’assemblée sont un bonheur pour le célébrant et les fiancés lorsque cela arrive. Plus souvent, le célébrant aura à cœur de permettre, un tant soit peu, par sa parole et son attitude cette participation : par le signe de croix, l’accueil chaleureux de tous, une invitation à la présence effective, un appel au silence avant l’oraison d’ouverture pour se tourner intérieurement vers Dieu et lui présenter les futurs mariés, un Alléluia simple à reprendre comme celui de Taizé, l’invitation aux couples déjà mariés à revivre leurs consentements, l’introduction au Notre-Père, etc.
Quant à l’équipe de préparation au mariage, elle est présente dans les liturgies au cours de cheminement, mais sa petitesse ne permet pas sa présence aux mariages. Un parrainage des couples en chemin par un couple de la paroisse n’est pas plus possible chez nous. Cela serait bon pourtant et manifesterait la présence de la communauté par quelques uns de ses membres.
Article extrait de Célébrer n°386
—
[1]Texte national de l’orientation de la catéchèse en France, p. 54.
[2]Idem, p. 43.