La place du chant de communion
Par Serge Kerrien, Diacre permanent et délégué épiscopal au diocèse de Saint-Brieuc pour les questions de catéchèse et catéchuménat, pastorale sacramentelle et liturgique, formation, pèlerinages et pardons.
« Pendant que le prêtre consomme le sacrement, on commence le chant de communion … » (PGMR n° 86)
L’habitude de chanter pendant la communion est très ancienne.
Depuis les tout premiers siècles, le chant d’un psaume accompagnait la procession de communion. Plus tard, d’autres chants apparaîtront, notamment les antiennes qui encadrent le psaume. Au VIIIe siècle, le psaume de communion devient obligatoire. Au Moyen-Age, la raréfaction des commuions fit disparaître le psaume ; seule l’antienne demeura, chantée après la communion. Nous avons hérité aujourd’hui de ces deux moments où le chant trouve sa place : pendant ou après la communion. Mais, selon le choix, le chant de communion n’a ni le même sens ni la même teneur.
Chanter pendant la communion
Dans ce premier cas, le chant accompagne la procession de communion. Quel en est le sens ? La Présentation générale du missel romain (PGMR) écrit que le chant de communion « exprime par l’unité des voix l’union spirituelle entre les communiants, montre la joie du cœur et met davantage en lumière le caractère communautaire de la procession qui conduit à la réception de l’Eucharistie » (n° 86). Ce chant prendra donc, de préférence, la forme d’un processionnal, c’est-à-dire d’un chant dont le refrain puisse être facilement repris par une assemblée qui n’a, entre les mains, ni manuel, ni feuille de chant. On peut aussi choisir un chant ou un motet que la chorale chante seule. Le chant crée alors un climat propice au recueillement et permet à chacun de se préparer au don que le Christ fait de son corps et de son sang. Quelle que soit la forme retenue, le choix des paroles est déterminant. Elles ont à développer un aspect du mystère de l’Eucharistie ou à mettre en lien les texte du jour avec la communion.
Chanter après la communion
Lorsque la distribution de la communion est achevée, le prêtre et les fidèles, si cela est opportun, prient en silence pendant un certain temps. Si on le décide ainsi, toute l’assemblée pourra aussi exécuter une hymne, un psaume, ou un autre chant de louange (PGMR n° 88).
Si on choisit de chanter une hymne d’action de grâce, ce chant jaillira du silence. Sa forme sera telle que tous puissent y participer largement, et même intégralement dans le cas d’une hymne (on se souviendra qu’une hymne n’a pas de refrain et que ses strophes se chantent à la suite). Ce chant prend alors un sens symbolique fort : le corps du Christ partagé fait de nous un même corps, l’Eglise. Chanter tous ensemble renforce ce côté communautaire et fait de l’assemblée une Eglise de la louange. Le chant réalise, en unissant les voix, l’unité construite par l’Eucharistie.
Il ne faudrait pas oublier que le chant d’un psaume, pendant ou après la communion, est traditionnel. Ainsi, on peut chanter les psaumes 29, 39, 66, 105, 117, 135, 137 en action de grâce, bénir le Seigneur avec les psaumes 33, 65, 102, 103, 144 et le louer en chantant les psaumes 8, 97, 116, 147 et 150.
Une variété de formes
Il est nécessaire, pour éviter que le chant ne crée une forme d’ennui au cours de la célébration, d’en varier les formes. Trop souvent, nous nous contentons de cantiques (forme à couplets et refrain), puis faciles à mettre en œuvre. Le risque, alors, est de faire perdre à la liturgie la variété et la richesse des actes et du chant, d’installer une forme unique qui ne met pas en valeur la richesse des rites successifs. Autant un chant avec refrain convient pendant la communion, autant il serait judicieux de varier la forme du chant après la communion. De cette manière, chaque rite a son propre relief, surtout si l’on chante presque aussitôt un chant d’envoi de la même forme que le chant d’action de grâce.
Le dernier chant de la messe ?
Le chant de communion est le dernier chant rituel de la messe. Le missel n’en prévoit pas d’autre. La Présentation générale du missel romain précise cependant au n° 90 : « Chacun retourne à ses bonnes œuvres en louant et bénissant le Seigneur ». La louange n’est pas forcément un chant ; elle est d’abord une attitude intérieure, mais rien n’interdit de l’extérioriser par le chant. Un chant d’envoi ou de louange est possible, mais ni obligatoire, ni systématique. Il est soit un envoi et les paroles le disent ; soit une louange finale, soit un chant à la Vierge Marie, surtout lors des fêtes mariales, aux mois de mai ou d’octobre. Il faudrait éviter, pour que la liturgie ouvre toujours à l’espérance, de reprendre le chant d’ouverture. Cela risquerait alors d’enfermer la liturgie sur elle-même au lieu de l’ouvrir à la mission.