Du bon usage du dernier adieu
Par P. Michel Leroy
« Ce rite veut exprimer le dernier adieu par lequel la communauté chrétienne salue un de ses membres avant que le corps ne soit emporté ou inhumé. » (La célébration des obsèques – Rituel des funérailles I, n°99). Dans ses textes, chants et gestes, le temps du « dernier adieu » doit permettre à toute la communauté et à la famille de « remettre » le défunt à Dieu.
L’invitatoire et le silence
L’invitatoire donne l’orientation fondamentale de tout le temps du dernier adieu, une dernière salutation, un acte de foi.
Le dernier adieu : une dernière salutation
Á la fin de la célébration à l’église, on salue le défunt avant qu’il ne soit emporté. Cette salutation a une orientation précise. Même si les invitatoires nous disent de « penser à tout ce que nous avons vécu avec le défunt » (Rituel, n°106), il ne s’agit pas de reprendre tout ce qui aura été dit auparavant, dès le début de la célébration, pour évoquer la vie défunt. Si ce dernier moment de la célébration permet de favoriser encore une fois la proximité avec le défunt, c’est aussi une invitation à la mémoire non seulement de ce qu’il est pour les proches ou pour l’assemblée mais aussi pour Dieu. Une fois encore, la communauté chrétienne le confie dans sa prière à Dieu. Les chants, les gestes ou prières devront permettre d’exprimer cette participation de l’assemblée.
Le dernier adieu : un acte de foi
Dire ainsi que ce temps est un « dernier adieu », c’est dire qu’il n’est pas seulement un « au revoir ». L’« au revoir » ne signifie que faiblement ce que peut être ce temps de l’adieu. Cela pourrait nous faire penser que tout ne dépend que de nous. Mais si nous espérons revoir le défunt, c’est « quand Dieu nous réunira dans la joie de son royaume. » (Rituel, n°106) Ainsi, il importe de nous situer « dans l’attente de la résurrection » (Rituel, n°1).
Ce moment est donc profondément un acte de foi, une « remise à Dieu » dans l’attente de la résurrection (tant pour le défunt que pour nous) par toute la communauté. L’acte de foi qui a traversé toute la célébration, et marque aussi ce temps, est acte de confiance et d’espérance. Confiance qui s’exprime par les chants mais aussi par le climat. Espérance qui se fonde sur la résurrection du Christ. Celle-ci est fortement inscrite dans les textes, les invitations à prier :
« C’est le mystère pascal du Christ que l’Église célèbre, avec foi, dans les funérailles de ses enfants…dans l’attente de la résurrection des morts et la bienheureuse espérance de l’avènement du Christ. » (Rituel, n°1)
Un « face à Dieu » est possible par delà la mort. Cette résurrection est souhaitée pour le défunt. Mais elle est aussi souhaitée pour chacun de nous. Que nous puissions nous retrouver avec nos défunts par-delà la séparation de la mort est possible, et est l’objet de notre espérance. La célébration des obsèques est ce moment où, dans la confiance au Père, nous rappelons que nous espérons nous retrouver. Dans les funérailles d’enfants, on insiste sur l’assurance de l’accueil par Dieu (Rituel, n°156-157).
Ce rappel doit nous permettre d’éviter une confusion, qui nous vient de l’ancien rituel, c’est-à-dire de confondre ce temps avec ce qui était l’« absoute ». Désormais il ne s’agit plus, à ce moment de la célébration, d’absoudre les péchés. Par contre, toute la célébration des funérailles est une prière pour que les défunts « passent avec le Christ de la mort à la vie, qu’ils soient purifiés dans leur âme » (Rituel, n°1). Ceci nous invite à bien poser les gestes, dire les textes et prières, pour le signifier tout au long de la célébration ; et … de ne pas omettre, entre autres, le temps des invocations et de la préparation pénitentielle, au début des obsèques.
Après l’invitatoire, le silence est important pour l’acte de mémoire et de foi. Le silence aide à la « séparation ». Il ne gomme pas la tristesse et la douleur, mais il invite à l’espérance puisque « les chrétiens, comme membres du Christ, ne peuvent être séparés, car ils ne font qu’un en lui. » (Rituel, n°99) Si ce moment après l’invitatoire peut être aussi un temps pour saluer le défunt, il est à noter que les discours « officiels » n’ont normalement pas lieu d’être à ce moment-là. Davantage, ils « auront leur place à l’issue de la cérémonie religieuse. » (Rituel, n°106, note 1)
Le chant rituel
Ce chant doit « apparaître à tous comme le sommet de l’adieu de toute l’assemblée. » (Rituel, n°101) Il doit tendre à créer le climat de confiance et d’espérance. Cette confiance est fondée sur l’accueil possible du Père, mais aussi sur ce qui a été dit du mystère pascal. Il est intéressant de noter les différents thèmes qui peuvent être associés à ce chant. On les trouve, dans le Rituel, en parallèle du chant « Sur le seuil de sa maison » : Dieu l’accueille ; Au revoir (en Dieu) ; Pardon et salut en Jésus-Christ ; Rappel du baptême ; Résurrection ; Mort – nouvelle naissance. Le chant pourra insister plus sur tel ou tel aspect. On entend parfois, à la place de ce chant, un chant adressé à Marie ! On comprend aisément qu’il n’est pas souhaitable de le prendre à ce moment-là.
Si ce chant est habituellement adressé au défunt, il est possible de prendre des chants ou des répons qui soient plus thématiques et tournés vers l’assemblée. Les invocations peuvent aussi remplacer les chants ou les répons. Ces invocations, comme celles du début de la célébration, sont adressées au Christ, mais peuvent aussi être adressées au Père. Quelle que soit la formule utilisée, il est important que toute l’assemblée participe d’une manière ou d’une autre.
Les gestes et signes
Les gestes et signes portés par le rituel sont principalement l’encensement et la bénédiction, « rappel du baptême » et signe de respect pour le corps d’un chrétien qui a été le « temple de l’Esprit saint » (Rituel, n°102). L’encensement indique le respect du corps, comme il peut être fait par l’embaumement. C’est aussi le symbole de la prière qui monte devant Dieu. L’encensement est toujours facultatif (Rituel, n°102) Par contre, « le dernier adieu est le moment par excellence où il convient de solenniser l’aspersion. Ici, plus qu’à tout autre moment, elle peut rappeler que le baptême est le lien qui unit dans la foi l’assemblée au défunt. Cela sera plus manifeste si toute l’assemblée vient, à la suite du prêtre, faire ce geste qui conclura alors le dernier adieu. » (Rituel, n°102)
Il est aussi possible de proposer d’autres gestes, comme venir toucher le cercueil. Ainsi, ceux qui ne sont pas croyants peuvent aussi manifester leur sympathie sans malaise.
L’oraison
L’oraison permet de conclure ce temps et donc de résumer tout ce qui y a été vécu et dit. Comme toute oraison, elle nous met dans l’attitude de mémoire de ce que Dieu – Père, Fils, et Saint esprit – peut faire pour nous. Encore une fois, au cours de la célébration, et plus particulièrement dans ce dernier adieu, c’est la confiance et l’espérance qui dominent. Confiance qui s’appuie sur l’amour de Dieu (Rituel, n°122), qui est plus fort que la mort (n°123). Espérance de trouver « la joie, la paix » ( n°122), en Lui.
Mais tout en rappelant l’aspect positif du travail, du labeur, de la vie du défunt, c’est encore le moment de demander pardon et d’invoquer la miséricorde de Dieu (n°123-124). Si l’on demande l’accueil du défunt (n°126-127), il est aussi demandé le réconfort pour ceux qui restent (n°125).
Article extrait de la revue Célébrer n°305
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