L’été, le temps des pèlerinages
Le pèlerinage est une expérience personnelle vécue à la suite d’une décision volontaire dont les motivations peuvent être multiples. Mais quelles que soient les motivations, le pèlerin s’engage dans une démarche particulière qui peut le modifier, le transformer. Le pèlerinage est une forme particulière de piété personnelle qui peut être communautaire. La pratique des pèlerinages est universelle et se retrouve dans toutes les cultures.
Le pèlerin est différent du touriste, il marche vers un ailleurs sacré. Il faut pour cela qu’il se détache de son univers habituel et quotidien, qu’il accepte un dépouillement préalable au départ, jusque dans l’abandon des biens matériels. En entrant dans une communauté fraternelle d’intentions et de pratiques rituelles, il se prépare à une rencontre avec le divin. C’est au plus profond de lui-même que l’être humain recherche la présence divine. En s’engageant sur les routes, il répond à un appel qui lui fera découvrir l’origine de son être.
Il s’agit d’un acte ecclésial qui a son importance parce qu’il témoigne d’une vérité de foi. Pour qu’il y ait pèlerinage, il faut qu’il y ait déplacement, progression vers un lieu saint. Ce voyage comporte donc un départ, un cheminement et l’arrivée sur un lieu de vénération.
Au départ, s’opère une rupture avec le quotidien. A la suite d’Abraham, à qui le Seigneur dit : « Quitte ton pays, ta parenté, la maison de ton père pour le pays que je t’indiquerai » (Gn 12, 1), le pèlerin part sur des chemins inconnus. Les Pères du IVème siècles rappellent que nous sommes appelés tel Abraham à tout quitter pour répondre à l’appel du Seigneur.
Succède ensuite la marche avec son lot de souffrances et d’angoisse Cette marche peut devenir chemin de conversion. Il s’agit d’une forme d’ascèse vécue par le monachisme oriental. Le pèlerin devient l’étranger dans les endroits où il passe mais aussi à l’égard de lui-même. Le pèlerinage n’est pas une forme d’errance, tous les efforts sont concentrés sur un but à atteindre. Il a un début et une fin, même s’il prend parfois plusieurs mois, voire plusieurs années. Il a pour aboutissement l’arrivée sur un lieu saint.
Depuis le IVème siècle, nous pouvons distinguer trois types fondamentaux de lieux de pèlerinage : les sites bibliques de l’Ancien et du Nouveau Testament, les tombeaux ou reliquaires des martyrs ou des saints, les lieux de résidence de moines célèbres.
Les pèlerins, à début de la chrétienté évoluaient en groupe pour se prémunir des dangers. Ils constituaient un groupe en marche formant le peuple de Dieu, à l’image de l’Eglise qui progresse vers le Royaume. Le peuple en exode qui traverse le désert demeure la figure du pèlerinage en Occident.
Sortir de son quotidien, de ses habitudes pour le temps d’un pélerinage peut aider à se découvrir soi-même et prendre conscience de ce qui nous anime. La marche devient cheminement spirituel, progression intérieure et reconnaissance en soi de la présence de Dieu. Le pélerinage reste souvent un événement marquant dans la vie du pélerin. Le pèlerinage est une manifestation matérielle d’une démarche spirituelle. Il marque souvent une rupture entre une vie antérieure et une vie nouvelle. La joie à l’arrivée au sanctuaire restera un souvenir intense.
Le pélerinage, un acte de foi
Extrait du Directoire sur la piété populaire et la liturgie1
Le pèlerinage est essentiellement un acte cultuel : de fait, en marchant vers le sanctuaire, le pèlerin va à la rencontre de Dieu pour demeurer en sa présence, l’adorer et lui ouvrir son cœur (…)
Dans le sanctuaire, le pèlerin accomplit un certain nombre d’actes cultuels, qui appartiennent soit au domaine de la liturgie, soit à celui de la piété populaire. Sa prière prend des formes variées : prière de louange et d’adoration adressée au Seigneur pour son bonté et sa sainteté ; prière d’action de grâces pour les dons reçus ; prière ayant pour but l’accomplissement d’un vœu, auquel le pèlerin s’était engagé face au Seigneur ; prière de demande de grâces nécessaires pour sa vie ; prière sollicitant le pardon de Dieu pour les péchés commis.
La prière du pèlerin s’adresse très souvent à la bienheureuse Vierge Marie, aux anges et aux saints, qu’il considère à juste raison comme des intercesseurs auprès du Très-Haut (…). L’image sacrée, vénérée dans le sanctuaire, qui représente le Christ ou la Vierge Marie, ou encore les anges ou les saints, est le signe de la présence divine et de l’amour providentiel de Dieu ; c’est pourquoi ce signe est saint.
Cette image est aussi le témoignage des multiples prières qui se sont élevées devant elle, de génération en génération : prières de supplication dans les besoins, prières exprimant la douleur de celui qui est affligé, prières aussi de jubilation et de remerciements de la part de celui qui a obtenu grâce et miséricorde.
Le déroulement d’un pèlerinage
Extrait du Directoire sur la piété populaire et la liturgie
287. A l’image du sanctuaire, qui a été défini comme un lieu de prières, le pèlerinage peut être présenté comme un chemin, dont chaque étape est marquée et animée par la prière. Durant ce parcours qui mène au sanctuaire, la Parole de Dieu est destinée à éclairer, guider, nourrir et soutenir le pèlerin.
La réussite d’un pèlerinage, tant d’un point de vue culturel que pour les fruits spirituels, qu’il peut apporter au fidèle, dépend du bon ordonnancement des célébrations et de la présentation appropriée de ses diverses phases.
Le départ du pèlerinage doit être marqué par un moment de prières, qui se déroule dans l’église paroissiale ou dans un lieu plus adapté ; il peut consister en la célébration de l’Eucharistie ou d’une partie de la Liturgie des heures2, ou encore en une bénédiction particulière des pèlerins.3
La dernière étape du pèlerinage doit donner lieu à une prière plus intense ; il est souhaitable qu’à l’approche du sanctuaire, le chemin soit accompli à pied, et que des prières et des chants accompagnent cette procession ; les pèlerins ne manqueront pas de s’arrêter près des édicules qui jalonnent éventuellement le trajet qui mène au sanctuaire.
L’accueil des pèlerins peut donner lieu à une sorte de « liturgie du seuil » ; celle-ci n’est pas seulement destinée à souligner la dimension humaine de la rencontre entre les pèlerins et les responsables du sanctuaire, mais elle doit revêtir une signification éminente au niveau de la foi. De plus, il est souhaitable, si possible, que les responsables des sanctuaires aillent eux-mêmes à la rencontre des pèlerins pour accomplir avec eux la dernière étape du chemin.
Le séjour dans le sanctuaire doit évidemment constituer le moment le plus intense du pèlerinage ; il est caractérisé par l’engagement du pèlerin à la conversion personnelle ; celui-ci est appelé à la concrétiser en recevant le sacrement de la réconciliation. Le séjour est aussi marqué par des prières particulières, d’action de grâces, de supplications ou de demandes d’intercession, qui sont liées au caractère propre du sanctuaire et aux buts du pèlerinage, et aussi par la célébration de l’Eucharistie, qui est le point culminant du pèlerinage.4
La conclusion du pèlerinage doit être soulignée par un moment de prières, qui a lieu soit dans le sanctuaire, soit dans l’église, d’où les pèlerins sont partis5. Il est l’occasion pour les fidèles de rendre grâces à Dieu pour le don du pèlerinage qui s’achève, et il leur permet aussi de demander au Seigneur de les aider à mieux vivre leur vocation chrétienne au retour à la maison.
Depuis les premiers siècles de l’Eglise, le pèlerin désire emporter avec lui des « souvenirs » du sanctuaire qu’il a visité. Il convient de veiller à la qualité des objets, des images et des livres, afin qu’ils soient en mesure de transmettre l’esprit authentique du lieu saint. Il faut aussi veiller à ce que les points de vente ne se trouvent pas dans l’enceinte du sanctuaire, et soient dépourvus de tout caractère mercantile.
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- Directoire sur la piété populaire et la liturgie n° 26, Principes et orientations, Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, Bayard/Fleurus – Mame/Cerf
- Cf. Rituale romanum, De benedictionibus, Ordo ad benedicendos peregrinos, 407
- Cf. ibid, 409 – 419
- Cf. p. 218 – 224, n° 265 – 273
- Cf. Rituale romanum, De benedictionibus, Ordo benedictionis peregrinorum ante vel post reditum , 420 – 430