Célébrer les baptêmes selon le calendrier liturgique
Quand convient-il de célébrer les baptêmes des petits enfants ? À cette question le Rituel donne d’abord une réponse générale et fondamentale, d’ordre théologique, qui concerne tous les baptêmes, quel que soit l’âge des demandeurs :
« La célébration doit toujours manifester le caractère pascal qui lui est propre. » (Notes doctrinales de l’Initiation chrétienne, n° 28)1.
Le caractère pascal du baptême
Qu’est-ce à dire ? Cela renvoie au n° 6 de ces Notes doctrinales qui évoque le sacrement du baptême comme participation à la mort et à la résurrection du Christ :
« Les baptisés, devenus un seul être avec le Christ par une mort semblable à la sienne, et ensevelis avec lui dans la mort, sont aussi revivifiés en lui et ressuscités avec lui. Par le baptême en effet, c’est vraiment le Mystère pascal qui est rappelé et qui est à l’œuvre en tant qu’il fait passer les hommes de la mort au péché à la vie.
C’est pourquoi la joie de la résurrection doit se manifester quand on célèbre le baptême, surtout à la veillée pascale ou le dimanche. »
Les Notes doctrinales et pastorales du Rituel du baptême des petits enfants soulignent, dans quatre paragraphes (n° 44, 63, 64, 67), cette importance du caractère pascal du baptême. « Pour mettre en lumière le caractère pascal du baptême, il est recommandé de le célébrer durant la veillée pascale ou le dimanche, quand l’Église commémore la résurrection du Seigneur. On pourra même le conférer, à condition que cela ne soit pas trop fréquent, au cours de la messe dominicale… » (n° 44). Les paragraphes 63 et 64 indiquent les normes à respecter pour inclure le baptême d’un bébé dans la veillée pascale et la messe dominicale. Et le déroulement liturgique proprement dit du baptême s’ouvre avec cette affirmation (n° 67) : « Le baptême a lieu autant que possible, le dimanche, jour où l’Église célèbre la Pâque du Christ. »
L’insistance est notable sur l’importance de célébrer le baptême des petits enfants à la veillée pascale et le dimanche. Mais la mention « autant que possible » manifeste que dans certaines situations exceptionnelles, pour des raisons pastorales, tel prêtre ou tel diacre sera peut-être conduit à célébrer ce sacrement un samedi, ou bien même un dimanche de Carême. Mais alors, dans ces cas, de quelle façon mettre en lumière ce caractère pascal ?
Le Baptême célébré au cours de la veillée pascale
De nombreux pasteurs et des équipes liturgiques pensent que la veillée pascale est véritablement le lieu de l’initiation chrétienne des adultes, éventuellement du baptême des enfants en âge scolaire, mais résistent à l’idée de baptiser des bébés au cours de cette liturgie nocturne.
Pourtant, l’insistance de l’Église est claire. Quels sont donc les obstacles à cette pratique ? Beaucoup supposent que les parents des petits à baptiser ne sont pas « au niveau » de la veillée pascale. Une telle hypothèse de l’esprit demande réflexion. La veillée pascale est le sommet de l’année liturgique, elle est formatrice au plus haut point de la foi chrétienne, elle est généralement très bien préparée localement, vivante, festive et riche de symboles. Qu’est-ce qui empêche de proposer cette célébration pour le baptême de leur bébé à tels ou tels parents que l’on sent ouverts, prêts à faire un pas de plus, à découvrir un aspect de l’Église qui leur est encore inconnu ?
La veillée pascale ne constitue-t-elle pas un lieu magnifique d’évangélisation pourvu que l’on ait le souci d’y introduire les familles de façon adéquate ? Il existe aujourd’hui une situation qui ne devrait poser aucun problème à cet égard : c’est le cas où un jeune père ou une jeune mère demande le baptême pour lui-même après un temps de catéchuménat, et le demande aussi pour un fils ou une fille encore bébé. Pourquoi ne pas proposer fortement de baptiser à la veillée pascale le parent concerné et l’enfant ? Belle figure du baptême chrétien où père et fils sont plongés en même temps dans la mort et la résurrection du Christ et deviennent ainsi frères en Lui ! De fait, cela arrive, mais pas encore très souvent. Pourtant, quelle force a ce geste baptismal ! Nous en avons été témoins plusieurs fois en banlieue parisienne.
Une autre objection est quelquefois soulevée : la veillée pascale est longue, comment le petit va-t-il vivre ce temps ? Mais un bébé qui a été nourri selon les habitudes familiales peut sagement attendre dans son couffin le moment précis du baptême. Qu’importe s’il dort au moment où se déroulent les rites baptismaux. Nous savons, en ce XXIème siècle, à quel point un petit d’homme est, de façon inconsciente, sensible aux ambiances. Baptiser un bébé à la veillée pascale est peut-être plus facile qu’on ne le pense communément, en particulier quand il s’agit d’un enfant qui appartient à une famille sérieusement chrétienne. Si le baptême est prévu par les parents à la période printanière, comme c’est souvent le cas, pourquoi ne pas les inviter à envisager le baptême à la veillée pascale ? Tant d’avantages militent pour cette pratique ! Le mystère pascal est fortement manifesté, le rassemblement de l’Église est clair, la joie de la fête s’exprime largement. Après coup, les parents expriment volontiers leur satisfaction d’un tel choix.
Le baptême célébré le dimanche
Chaque dimanche l’Église célèbre Pâques ! Aussi est-il recommandé que les baptêmes – y compris pour les petits enfants – aient lieu ce premier jour de la semaine, jour de la résurrection du Seigneur. Après la veillée pascale, le meilleur moment n’est-il pas le dimanche de Pâques, ou les dimanches du temps pascal ? Célébrer aussi les baptêmes lors des grandes fêtes liturgiques telles que Noël, l’Épiphanie, l’Assomption de la Vierge Marie ou la Toussaint permet aux familles de bénéficier de cette célébration du mystère pascal dans une atmosphère festive et chaleureuse.
Le baptême célébré au cours de la messe dominicale
Voici une pratique que l’Église encourage (Rituel n° 64, p. 24-25) car elle met en valeur non seulement le caractère pascal du baptême mais encore son lien avec l’eucharistie et la communauté rassemblée. Nous sommes baptisés parce que nous sommes invités à la table du Seigneur avec tous nos frères. Des nombreux Pères de l’Église ont commenté ce lien entre baptême et eucharistie.
Le baptême en dehors du dimanche
Certaines circonstances ou certaines situations empêchent les familles de célébrer le baptême de leur petit le dimanche, et tel prêtre ou diacre est sollicité pour le samedi. Que faire pour aider à découvrir le mystère pascal manifesté dans ce sacrement ? En orientant toute la célébration vers le dimanche qui suit, en soulignant le caractère pascal qui façonne la liturgie baptismale. On peut, par exemple, mettre en valeur le signe de la croix, le geste avec l’eau et la parole qui l’accompagne (encore plus clair quand il s’agit du baptême par immersion), le vêtement blanc des ressuscités, la transmission de la lumière du Christ relevé d’entre les morts, toutes ces démarches d’une grande richesse symbolique déploient la signification de Pâques et orientent, au moyen d’une brève monition bien amenée, vers le dimanche.
S’il arrive que le baptême soit célébré pendant le Carême ?
Le Carême n’est pas le temps de la célébration du baptême, il est le temps de sa préparation. Il est donc normal que l’Église résiste à accepter des baptêmes pendant cette période liturgique (sauf cas d’urgence, bien sûr). Pourtant, certaines raisons pastorales peuvent obliger à cela.
Comment faire alors ?
En orientant la célébration vers Pâques. Il peut être bon de mettre en valeur la prière d’exorcisme et de délivrance qui nous arrache au péché pour nous faire vivre avec le Christ, d’annoncer Pâques avec la bénédiction de l’eau ou certaines prières d’intercession à tonalité pascale (cf. n° 228, p. 139). Après le geste baptismal proprement dit, ou bien juste avant de quitter le baptistère, on peut inviter l’assemblée à l’action de grâce qui sera déployée à Pâques.
Par Odette Sarda, théologienne appartenant à la congrégation des Dominicaines