Le Triduum Pascal #1 : le Jeudi saint
Alors qu’à l’origine, l’Église célébrait l’ensemble du mystère pascal du Christ lors d’une unique célébration, la vigile pascale, le besoin s’est fait sentir de développer chacune des facettes de ce même mystère en autant de célébrations : repas pascal, passion et mort du Seigneur, silence du tombeau, résurrection. Cela a commencé à Jérusalem, où l’on pouvait pérégriner de lieu en lieu sur les traces du Sauveur : Cénacle, Jardin des Oliviers, Golgotha, etc. Ainsi naquit au IVe siècle le « triduum pascal », les trois jours, selon l’expression de saint Augustin, du « Christ crucifié, enseveli et ressuscité », triduum qui allait donc du jeudi soir au dimanche de Pâques.
#1 : Le Jeudi saint – série d’articles proposée par le SNPLS à partir d’éléments fournis par Louis-Marie Chauvet
Selon les lieux et les époques, la journée du Jeudi saint a été ponctué de diverses célébrations. Ainsi à Rome, au VIIe siècle, la journée en comprenait trois : celle de la réconciliation des pénitents (qui pouvaient ainsi communier à Pâques), celle de la consécration des huiles (l’huile des malades, l’huile d’exorcisme, et surtout le saint chrême qui allait être utilisé à la vigile pascale pour les nouveaux baptisés), et celle de la mémoire de la Cène. Diverses formes de lavement des pieds ont également existé ce même jour.
Aujourd’hui, les deux dernières célébrations sont prévues pour le Jeudi saint. Mais, pour des raisons pastorales, la messe chrismale durant laquelle les huiles sont bénies et consacrées, est souvent anticipée un des premiers jours de la Semaine sainte. Le Jeudi saint est ainsi essentiellement centré sur la mémoire de la dernière Cène. Les trois lectures en donnent très clairement la portée : le sacrifice de l’agneau pascal qui inaugure le grand exode ; l’institution de l’eucharistie selon saint Paul ; le lavement des pieds selon l’Évangile de Jean. Le croisement entre le rite du lavement des pieds après l’homélie et la communion eucharistique est évidemment particulièrement parlant. Le quatrième Évangile a intentionnellement omis le récit de la Cène pour lui substituer celui du lavement des pieds. À travers ces lectures, l’Église est invitée à raviver le lien entre la double « mémoire » du Christ : celle, rituelle, de l’eucharistie (« Faites cela en mémoire de moi ») et celle, existentielle ou éthique, du service d’autrui (« … afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous »). Le chant traditionnel Ubi caritas est vera, Deus ibi est – « Où l’amour est véridique, Dieu lui-même est présent » – marque profondément la spiritualité du Jeudi saint.
La messe se prolonge par le transfert solennel du Saint-Sacrement au lieu de la réserve. L’adoration nocturne à laquelle sont alors invités les fidèles est imprégnée de l’atmosphère dramatique de la veille avec le Christ à Gethsémani.