Jeûne pascal et jeûne eucharistique
Par Sophie Gall-Alexeeff, Enseignante en liturgie et théologie sacramentaire
Le jeûne pascal du samedi saint
L’Église catholique demande à chaque baptisé de jeûner le vendredi saint et traditionnellement le conseille aussi le samedi saint.
On pourrait penser que ce jeûne ressemble aux autres jeûnes : démarche de pénitence, de purification et de conversion. Pourtant il ne se réduit pas à cela. C’est un jeûne de désir et d’attente du Christ-Époux. Dans l’Église de Rome au troisième siècle si une femme enceinte est malade et ne peut jeûner les deux jours, le samedi est privilégié. Le jeûne du samedi saint a certainement aussi existé en raison du caractère baptismal de la veillée pascale, pour la préparation des catéchumènes. (Didaché 7,4).
La signification du jeûne pascal n’était donc pas initialement liée au seul aspect de la commémoration de la passion et de la mort du Seigneur.
Le jeûne eucharistique
C’est à la lumière du jeûne pascal qu’il faut comprendre les jeûnes stricts que l’Église ancienne a prescrits avant chaque eucharistie.
Pendant des siècles, la pratique de l’Église latine fait s’abstenir de tout aliment depuis minuit jusqu’à la communion eucharistique. Cette règle connait des dispenses notamment à partir de la seconde guerre mondiale. La discipline actuelle exige (sauf pour les personnes âgées ou malade) de s’abstenir « au moins une heure avant la sainte communion de tout aliment et boisson, à l’exception seulement de l’eau et des médicaments. » (Can. 919). Le Catéchisme de l’Église catholique donne comme seul motif de se préparer convenablement à recevoir ce sacrement (n°1387).
On est bien loin du formalisme. Les baptisés sont invités à vivre le jeûne eucharistique dans la même attitude que celle que requiert le jeûne pascal du vendredi et surtout du samedi saint, comme une sorte de pré-vigile. Le mémorial pascal célébré dans l’eucharistie sera alors davantage perçu si le jeûne qui la précède est ainsi présenté : attente confiante avant la célébration du mystère pascal. De plus, en reliant le jeûne à l’attente de la venue du Seigneur, les fidèles donnent à cette pratique une portée à la fois eschatologique et historique, solidaires de ceux qui connaissent la faim et attendent des raisons d’espérer encore.
Pour approfondir : Arnaud Join-Lambert, Jeûne et mystère pascal, La Maison-Dieu n°232 ; 2002/4, p. 97-107.
Quelques rappels
Se passer de nourriture aide à acquérir la liberté du cœur (Catéchisme de l’Église catholique n° 2043).
Le vendredi est traditionnellement un jour de pratiques pénitentielles dans l’Église catholique en mémoire de la passion et de la mort du Christ le vendredi saint.
Le Code de droit canonique indique que tous les vendredis de l’année sont des jours de pénitence dans l’Église universelle (Can. 1250).
« Un temps viendra où l’Époux leur sera enlevé : ce jour-là ils jeûneront. » (Mc 2,20)
Jeûner pour attendre
Le jeûne du vendredi et du samedi saints est le noyau de tout jeûne chrétien.
Mémorial de la résurrection, l’eucharistie pascale nous rend l’Époux et rompt le jeûne pour inaugurer le festin des noces.
Jeuner pour se préparer
Le jeûne du Carême prépare le jeûne pascal. C’est un jeûne qui nous unit à la lutte de Jésus pour partager ensuite sa victoire.
Le jeûne a été primitivement inclus dans la préparation au baptême.
Cet article est extrait de la revue Célébrer n°389 : Carême et combat spirituel.