Des Rameaux à Pâques : cinq collectes pour un unique mystère

20 avril 2014 : Messe de Pâques en présence de Mgr Yves PATENÔTRE, archevêque de Sens, évêque d'Auxerre et célébration des 850 ans de la consécration de la cathédrale St Étienne de Sens (89), France.

20 avril 2014 : Messe de Pâques en présence de Mgr Yves PATENÔTRE, archevêque de Sens, évêque d’Auxerre et célébration des 850 ans de la consécration de la cathédrale St Étienne de Sens (89), France.

Par Gilles DrouinPrêtre du diocèse d’Évry, chargé d’enseignement au séminaire d’Issy les Moulineaux et directeur de l’Institut Supérieur de Liturgie du Theologicum (ICP)

Entre le dimanche des Rameaux et la fête de Pâques, les textes bibliques et liturgiques sont d’une grande richesse ; les collectes des jours saints, d’une qualité exceptionnelle, orientent, au sens propre, notre prière vers l’Orient véritable qui surgit du tombeau au matin de Pâques. Elles nous font entrer peu à peu dans le mystère.

Les collectes sont souvent négligées dans leur mise en œuvre concrète. Elles rendent compte de la manière dont la liturgie veut nous associer aux différentes facettes de l’unique mystère pascal du Christ. En ce sens, leur examen attentif, y compris en vue d’une prédication sur l’Écriture, s’avère spirituellement et pastoralement fécond.

Dimanche des Rameaux et de la Passion

La collecte du dimanche des Rameaux nous livre un condensé du mouvement pascal, dans la ligne de l’hymne aux Philippiens (Ph2, 7-11) entendu le même jour. Certes la Passion est valorisée, mais le mouvement est pris dans toute son ampleur, de l’Incarnation jusqu’à la Résurrection.

Collecte du dimanche des Rameaux

« Dieu éternel et tout puissant, pour montrer au genre humain quel abaissement il doit imiter, tu as voulu que notre Sauveur, dans un corps semblable au nôtre, subisse la mort de la croix : accorde-nous cette grâce de retenir les enseignements de sa Passion et d’avoir part à sa résurrection. »

Vigile pascale et Jour de Pâques

Les collectes de la vigile pascale et du dimanche de Pâques offrent les deux versants de l’unique mystère de la résurrection : dans la liturgie nocturne de la vigile, la richesse mystérique nous associe sacramentellement à la Pâque du Christ et le matin de Pâques, nous faisons l’expérience matudinale de la joyeuse rencontre du ressuscité.

Les tonalités de ces deux liturgies sont très différentes et complémentaires. Il serait dommage que le soin apporté par nos communautés à la mise en œuvre de la vigile se fasse au détriment de la messe du matin de Pâques, marquée par la joie de la rencontre avec le Vivant.

Vigile pascale

Dans cette admirable collecte pascale, il est question de notre renouvellement intégral. Deux conséquences pratiques :

– Il est souhaitable que la mise en œuvre de la collecte de la sainte nuit de Pâques soit particulièrement soignée. Elle est appelée à être chantée. Venant juste avant la lecture d’un passage fondateur de la théologie baptismale de l’Église romaine (Rm 6), elle doit se distinguer dans sa mise en œuvre, des oraisons qui suivent chacune des lectures de la vigile.

– La mémoire de l’initiation chrétienne, implicitement présente dans cette collecte, devrait engager les pasteurs à célébrer les trois sacrements au cours de cette unique liturgie, tant pour le bien spirituel des catéchumènes que celui des fidèles.

Collecte de la vigile pascale

« Dieu qui a fait resplendir cette nuit très sainte par la gloire de la résurrection du Seigneur, ravive en ton Église l’esprit filial que tu lui as donné, afin que, renouvelés dans notre esprit et notre âme, nous soyons tout entiers à ton service. »

Le jour de Pâques

La tonalité est voisine dans cette collecte du matin de Pâques, même si le terme « aujourd’hui » colore déjà cette liturgie de sa grâce propre : l’expérience du matin de Pâques telle qu’elle est relatée dans l’évangile. La liturgie de la Parole, avec les Actes (Ac 10, 34a, 37-43) puis le chapitre 5 de la 1ère lettre aux Corinthiens avec le passage aux « azymes nouvelles » (1Co 5, 7-8), signe le passage dans le temps de la joie pascale que nous célébrerons cinquante jours durant.

Collecte du Jour de Pâques

« Aujourd’hui, Dieu notre Père, tu nous ouvres la vie éternelle par la victoire de ton Fils sur la mort, et nous fêtons sa résurrection. Que ton Esprit fasse de nous des hommes nouveaux pour que nous ressuscitions avec le Christ dans la lumière de la vie. »

Jeudi saint

Le soir du jeudi saint, la collecte fait mémoire de l’institution de l’eucharistie, sacrement du don total du Christ, à qui l’on demande la communication de la vie et de la charité divines. Celles-ci sont appelées à s’épanouir dans la vie concrète du chrétien, comme le rappelle de façon très éloquente le geste du lavement des pieds célébré au cœur de cette même liturgie.

Collecte du jeudi saint

« Tu nous appelles, Dieu notre Père, à célébrer ce soir la Très sainte Cène, où ton Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort a voulu remettre à son Eglise le sacrifice de l’Alliance éternelle ; Fais que nous recevions de ce repas qui est le sacrement de  son amour la charité et la vie. »

Vendredi saint

Rarement une collecte présente une telle force d’expression. Prononcée juste après la prostration des célébrants, dans le silence du début de cette liturgie, elle en constitue l’ouverture très épurée. Deux formulaires sont prévus au Missel. Dans la collecte reproduite ici, la Passion, évidemment très présente, n’est pourtant évoquée que de façon discrète. C’est le mystère de la croix qui est proposé à notre prière, avec une demande de suivre le Christ pour revêtir avec lui la condition du nouvel Adam, libéré de la mort.

Collecte du vendredi saint.

« Seigneur notre Dieu par la Passion du Christ, tu as détruit la mort héritée du premier péché, la mort qui tenait l’humanité sous sa loi ; Accorde-nous d’être semblables à ton Fils : du fait de notre nature, nous avons dû connaître la condition du premier homme qui vient de la terre ; sanctifie-nous par ta grâce pour que nous connaissions désormais la condition de l’homme nouveau qui appartient au ciel. »

Les mots de la liturgie : la collecte

La collecte est la première des trois oraisons de la messe. On l’appelle aussi « prière d’ouverture » car elle conclut les rites d’ouverture, avant de commencer la liturgie de la Parole.

Elle porte ce nom parce qu’elle « collecte », elle rassemble la prière de toute l’assemblée. Le prêtre l’introduit par une invitation : « Prions le Seigneur », suivi d’un bref temps de silence : « Tous, avec le prêtre, font silence pendant un peu de temps pour prendre conscience qu’ils se tiennent en présence de Dieu, et pour mentionner intérieurement leurs intentions de prières » (PGMR 32).

La collecte de la messe est reprise dans la liturgie des Heures, à la fin de l’office.

Cet article est extrait de la revue Célébrer n°402.

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