La Maison-Dieu n° 318 : Lecture commentée de la lettre du pape François sur la formation liturgique Desiderio desideravi
La Lettre apostolique du pape François sur la formation liturgique du peuple de Dieu, Desiderio desideravi, publiée le 29 juin 2022, est un texte d’une importance singulière pour les formateurs et les acteurs de la liturgie. À distance des polémiques, mais aussi de diverses décisions canoniques récentes, le pape relit le sens fondamental de la liturgie. Il y apporte aussi des convictions plus personnelles : la liturgie comme « antidote au venin de la mondanité spirituelle », « la beauté de la vérité de la célébration liturgique », « une approche liturgico-sapientielle de la formation théologique ».
| La revue a souhaité présenter ce texte à quelque distance de sa publication (deux ans et demi), pour le commenter avec le recul que permet une première réception. Salué dès sa sortie, commenté, réfléchi, approfondi, reste encore largement à découvrir et à mettre en œuvre dans les lieux de formation (séminaires, universités, noviciats…). Pour en faciliter une lecture renouvelée, le texte de la Lettre a été intégré à ce numéro. Le commentaire a été effectué par différents enseignants de l’Institut supérieur de liturgie (ISL) de l’Institut catholique de Paris (ICP), en fonction de leurs domaines d’enseignement et de recherche ; chacun a voulu partager l’essentiel de sa lecture d’un passage de la Lettre, ainsi que l’intérêt et les ressources qu’il y trouve. Cette diversité de regards conduit à un « découpage » un peu artificiel de la Lettre, dont il ne faudrait pas perdre de vue l’unité : la formation à la liturgie de l’ensemble du peuple de Dieu s’impose parce que la liturgie est le lieu de rencontre le plus éminent avec le Ressuscité. |
À la présentation de la Lettre apostolique s’ajoute un varia dans lequel Michel Steinmetz s’intéresse à la relation entre réforme de l’Église et réforme liturgique en appuyant sa réflexion sur une analyse des rapports diocésains et nationaux suisses sur la synodalité.
Enfin on trouvera deux brèves chroniques concernant les colloques liturgiques de nos voisins : celui de l’Association des liturgistes italiens (APL), qui a eu lieu à la fin du mois d’août, et celui des liturgistes de langue allemande (AKL, regroupant des liturgistes suisses, allemands et autrichiens), au début du mois de septembre. En effet, nous gagnons à connaître les travaux et réflexions des liturgistes d’aires linguistiques à la fois proches et différentes, à en bénéficier, à échanger avec eux sur des questions qui nous sont communes, et à enrichir nos propres réflexions par l’apport de réflexions mûries dans d’autres contextes et parfois selon des approches ou des perspectives différentes.
Cette livraison également fournit les tables annuelles et décennales (2015-2024) de la revue : dix ans de recherches, d’approfondissement et de… formation liturgique !
Sommaire
La Lettre apostolique Desiderio desideravi, Pape François
La liturgie, « l’aujourd’hui » de l’histoire du salut (2-9), Hélène Bricout
À partir du récit de la dernière Cène, qui révèle le sens de l’histoire, s’énonce l’actualité permanente du mystère pascal dans la vie de l’Église, en particulier dans l’eucharistie où l’éternité nous atteint.
La liturgie, lieu de la rencontre avec le Christ (10-13), Isaïa Gazzola
La beauté de la liturgie réside dans sa capacité à nous faire rencontrer le Verbe incarné qui nous sauve ; en elle convergent notre attente de salut et le désir que Dieu a de nous, où se vit déjà un événement pascal.
L’Église, sacrement du corps du Christ (14-16), Christophe Lazowski
Une lecture typologique de la création d’Ève conduit à comprendre l’Église comme sacrement du corps du Christ qui incorpore les baptisés et les fait participer pleinement au culte rendu par le Christ au Père.
La liturgie, un antidote à la mondanité spirituelle (17-20), Gilles Drouin
Les « poisons » du gnosticisme et du néopélagianisme trouvent dans la liturgie bien comprise un antidote, car dans sa gratuité, elle nous préserve de vouloir « mettre la main sur la grâce » en nous mettant à l’école de la grâce.
Beauté de la vérité de la célébration chrétienne et émerveillement devant le mystère pascal (21-26), Olivier Praud
La vérité théologique de la liturgie exige d’en soigner la composition et la mise en œuvre sensible. Ainsi devient-elle perceptible et objet d’émerveillement devant le don du mystère pascal auquel elle ne cesse d’initier.
Former à la liturgie (27-39), Bénédicte Mariolle
L’objet de la formation liturgique consiste avant tout à développer notre capacité symbolique pour participer pleinement à l’action liturgique et dépasser les divisions qui blessent la communion ecclésiale. La formation liturgique de tous doit y contribuer.
Pour se laisser former « par » la liturgie, retrouver la capacité symbolique (40-47), Patrick Pretot
La formation par la liturgie, essentielle, est permanente, expérientielle, immersive. Elle consiste à retrouver le sens symbolique de la liturgie, de ses gestes et ses éléments sensibles pour les laisser nous conformer au Christ.
Ars celebrandi (48-60), Philippe Barras
À distance aussi bien du rubricisme que de la créativité débridée, l’art de célébrer permet par sa justesse de donner leur sens aux rites célébrés. Différents exemples illustrent les travers de ceux qui célèbrent, c’est-à-dire tous les participants. En raison de leur ministère, les prêtres ont à cet égard une responsabilité particulière.
Varia
Une liturgie à réformer ou la réforme par la liturgie ?, Michel Steinmetz
Réforme de l’Église et réforme de la liturgie vont souvent de pair dans l’histoire. La crise des abus et la révélation de l’une de ses causes majeures, le cléricalisme, ont rendu urgente la nécessité d’une réforme dans l’Église. La liturgie est peut-être une ressource pour penser la réforme de l’Église, d’autant plus qu’elle est un des lieux ou ces abus se produisent. L’analyse des rapports diocésains et nationaux suisses montrent à la fois l’attachement des fidèles a la liturgie et le besoin réel d’adaptation au monde contemporain, ainsi que celui, non moins réel, de formation du peuple chrétien. Les rapports rejoignent ainsi la perspective du pape Francois. Si la liturgie, et en particulier l’eucharistie, est au cœur de la vie de l’Église, la réforme de la liturgie, nécessaire pour demeurer « sommet et source » de la vie de l’Église, est une contribution majeure à la reforme de cette dernière.
Chroniques
« Habiter l’espace liturgique ». Colloque de L’APL, Padoue, 26-29 août 2024, Gilles Drouin
« Célébrer dans la métropole séculière. La liturgie devant les défis de la ville », Colloque de l’AKL, Bochum, 2-5 septembre 2024, Hélène Bricout
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